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Blogue : Aimez-vous faire du camping avec les Qallunaat?

Le camp scientifique et culturel du projet Imalirijiit à Kangiqsualujjuaq au Nunavik

Le camp scientifique et culturel du projet Imalirijiit à Kangiqsualujjuaq au Nunavik

Photo : Gwyneth Anne MacMillan

Radio-Canada

Comment partager des résultats scientifiques avec les communautés autochtones sur des territoires qu'ils habitent depuis des milliers d'années? C'est le défi que s'est lancé Gwyneth Anne MacMillan, une doctorante au Département de sciences biologiques de l'Université de Montréal. Voici le deuxième article de Mme MacMillan réalisé dans le cadre d'un séjour au Nunavik.

Par Gwyneth Anne MacMillan

La semaine dernière, j’ai fait un voyage de camping sur la magnifique rivière George qui traverse la péninsule d'Ungava, au Nunavik, dans le nord du Québec. L’expédition d’une trentaine de personnes était composée d'un petit groupe de scientifiques et de membres de la communauté de Kangiqsualujjuaq; des guides, une coordinatrice, des cuisinières, des aînés et un groupe de jeunes adolescents inuits.

Il s’agissait de la deuxième édition du projet Imalirijiit. Ce camp scientifique et culturel en plein air (ou « on the land » comme disent les Inuits) est organisé et financé conjointement par la communauté de Kangiqsualujjuaq et des chercheurs de l’Université du Québec à Trois-Rivières, de l’Université de Montréal, de l’OHMI Nunavik, et du Centre d’études nordiques. Le projet bénéficie également de plusieurs sources de financement, dont Savoir Polaire Canada et la fondation W. Garfield Weston.

Imalirijiit, qui signifie « ceux qui étudient l’eau », est un projet collaboratif unique qui vise à susciter l’intérêt de la communauté pour la science et pour les enjeux environnementaux, à former des jeunes de la communauté et à établir un programme de surveillance communautaire de l’environnement à long terme.

Le projet Imalirijiit, un camp scientifique et culturel en plein air

Le projet Imalirijiit, un camp scientifique et culturel en plein air

Photo : Gwyneth Anne MacMillan

Dès notre sortie de l’avion, notre accueil dans la communauté m’a agréablement surprise. Durant mes travaux de doctorat sur le terrain, je ne m’étais jamais sentie aussi bien admise dans une communauté nordique. Tout le monde semblait heureux de nous voir. Nous recevions des salutations chaleureuses à l’aéroport, à l’épicerie et dans la rue. Les membres du conseil municipal, du comité jeunesse, du comité de soutien aux chasseurs et la mairesse se sont tous impliqués et mobilisés de façon hors pair pour organiser et financer le projet.

Quelques jours avant le camp, des annonces à la radio et des appels téléphoniques ont permis de nous trouver des guides, des bateaux et une tente toilette et de remplir une glacière d’échantillons de phoques et de poissons pour notre suivi sur les contaminants dans la nourriture traditionnelle. Notre équipement de camping était acheté et déplacé par une flotte d’aimables chauffeurs.

Une fois au camp, les guides, cuisinières, aînées et jeunes participants se sont montrés très intéressés et motivés par le projet. Après un début d’expédition houleux, alors que des jeunes voulaient retourner immédiatement au village, car ils n’aimaient pas « faire du camping avec les *Qallunaat, notre groupe s’est rapidement rassemblé autour d’objectifs communs. Tout le monde a participé aux activités éducatives et scientifiques; les guides ont aidé lors de la filtration de l’eau, les jeunes, débordant d’enthousiasme, ont cherché des échantillons d’araignées et tout le monde est resté accroupi pendant un après-midi complet afin de trier des invertébrés benthiques. De retour au village, les participants que nous croisions portaient leur chandail du camp avec fierté et nous disaient « À l’année prochaine! »

Imalirijiit est un projet collaboratif  visant à susciter l’intérêt de la communauté à la science et aux enjeux environnementaux.

Imalirijiit est un projet collaboratif visant à susciter l’intérêt de la communauté à la science et aux enjeux environnementaux.

Photo : Gwyneth Anne MacMillan

Contrairement à mes travaux de recherches indépendants au doctorat, le projet Imalirijiit est, depuis le début, un projet de recherche collaborative. Le projet a démarré avec une lettre d’invitation envoyée aux communautés par la coordinatrice du projet, José Gérin-Lajoie, de l’Université de Québec à Trois-Rivières, afin d’organiser conjointement un camp scientifique et culturel où les objectifs, les activités et le lieu étaient définis par les deux parties. Cette démarche de recherche collaborative permet l'« empowerment » de la communauté et signifie que celle-ci utilise la science pour répondre à ses besoins et qu'elle n’en est plus l’objet d’étude. La façon dont les Kangiqsualujjuammiut s’approprient le projet en disant « C’est notre projet! » démontre bien ce changement de position radical.

Cela signifie aussi que les membres de la communauté sont intéressés par les résultats scientifiques du projet. Ma collègue Émilie Hébert-Houle explique : « Les résultats sont collectés pour eux et avec eux, en formant leur jeunesse en même temps. C’est une formule très gagnante! » Après la première édition du camp en 2016, l’équipe scientifique a été invitée à Kangiqsualujjuaq pour présenter les résultats de ses recherches à la réunion annuelle de Parnasimautik, une importante consultation communautaire qui sert à améliorer les conditions socioéconomiques des communautés et à bâtir un avenir prometteur pour les enfants du Nunavik.

Le projet Imalirijiit permet de former des jeunes de la communauté.

Le projet Imalirijiit permet de former des jeunes de la communauté.

Photo : Gwyneth Anne MacMillan

Quelques jours seulement après notre retour du camp cette année, la mairesse, Hilda Snowball, nous demandait déjà : « Quand est-ce qu’on va avoir les résultats. J’ai hâte! » Le succès du camp et la nouvelle que l’eau de la rivière George est de bonne qualité ont aussi été partagés avec tout le monde sur les ondes de la radio communautaire. Quand un des guides nous a demandé : « Pourquoi étudiez-vous l’eau de la rivière? », nous avons pu répondre que c’est la communauté elle-même qui avait décidé de faire un suivi de la qualité de l’eau de la rivière en amont d’un projet de mine dans le bassin versant.

Avoir eu la chance de participer au projet Imalirijiit cette année m’a permis de voir qu’un projet de recherche véritablement collaboratif peut faciliter un meilleur accueil de la science (et aussi des scientifiques!) dans les communautés autochtones nordiques.

De jeunes participants très intéressés et motivés par le projet Imalirijiit.

De jeunes participants très intéressés et motivés par le projet Imalirijiit.

Photo : Gwyneth Anne MacMillan

Remerciements : À la communauté de Kangiqsualujjuaq et à l’équipe d'Imalirijiit!

* Nom donné par les Inuits aux « Blancs »

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