Pike River, capitale de la tortue

La directrice générale de la municipalité de Pike River, Sonia Côté, et son adjointe, Pascale Massé
Photo : Radio-Canada / Marie-France Bélanger
Prenez note que cet article publié en 2017 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
La municipalité de Pike River, en Montérégie, tient samedi son deuxième festival de la tortue. La petite ville, qui compte le seul site de ponte connu de la tortue-molle à épines, travaille étroitement avec le zoo de Granby pour mieux protéger ces animaux, souvent mal-aimés.
Un texte de Marie-France Bélanger, de l'émission Les années lumière
« C’est beau le castor, mais nous, on espère être la capitale de la tortue », affirme la directrice générale de la municipalité, Sonia Côté.
L'objectif de Pike River : créer un événement rassembleur et contribuer à la protection de la tortue-molle à épines.
Au début, la tortue-molle était considérée comme la bête méchante parce qu’elle dérangeait. On s’est dit : "C’est important qu’on la sauve, on va la mettre à l’honneur."
« Je pense que le festival permet d’apprivoiser la bête », estime Pascale Massé, adjointe à la Ville de Pike River.
Au menu : kiosques, conférenciers, et rencontre avec Suzette et Georges, deux spécimens de tortue-molle à épines domiciliés au zoo de Granby, partenaire du festival.
La tortue-molle à épines
« La tortue-molle à épines est très spéciale », explique le directeur de la recherche et de la conservation du zoo, Patrick Paré.
Sa carapace molle, et non dure, constitue une caractéristique rare dans le monde des tortues, qui la rend vulnérable aux prédateurs, précise le biologiste.
Compte tenu du manque de protection dû à la mollesse de sa carapace, elle se déplace rapidement, un trait étonnant pour un animal associé à la lenteur.

Une tortue-molle à épine née il y a un an au zoo de Granby
Photo : Radio-Canada / Marie-France Bélanger
Quelques caractéristiques de la tortue-molle à épines
Statut : espèce menacée
Carapace molle recouverte de peau ressemblant à du cuir
Taille de la femelle à 15 ans : 50 cm de longueur. Le mâle est deux fois plus petit.
Tête effilée et nez allongé
Couleur : vert olive
Longévité : environ 50 ans
Territoire : elle n’est présente qu’à quelques endroits au Québec et en Ontario. Au Québec, elle se concentre dans la baie Missisquoi, dans le lac Champlain et dans la rivière aux Brochets.
Données du ministère de la Forêt, de la Faune et des Parcs du Québec
Au total, les biologistes du zoo de Granby ont observé la présence de cinq espèces de tortues d’eau douce à Pike River, sur les huit présentes au Québec.
« Et les trois autres espèces, qu’on ne retrouve pas ici, on ne pourrait pas de toute façon les retrouver ici, parce qu’elles vivent en Outaouais », explique Patrick Paré.
Sur les huit espèces présentes au Québec, cinq sont vulnérables ou menacées.
Les principales menaces
Comme toutes les tortues, la tortue-molle à épines est confrontée à plusieurs menaces.
La plus importante est la diminution de la taille de son habitat en raison de la disparition des bandes riveraines.
On compte aussi la prédation des oeufs par les ratons laveurs, qui en raffolent, ainsi que les effets de la présence des plaisanciers et de braconniers.
Les tortues peuvent être blessées par les bateaux qui circulent sur le lac Champlain. Certains tentent aussi de revendre leurs oeufs sur le marché noir, ce qui est totalement illégal, précise Patrick Paré.

Patrick Paré, biologiste et directeur de la recherche et de la conservation au zoo de Granby
Photo : Radio-Canada / Marie-France Bélanger
Le projet de conservation du zoo de Granby
La tortue-molle à épines est au coeur de l’un des 10 projets de conservation du zoo de Granby depuis 2009.
Chaque année, des biologistes surveillent attentivement le site de ponte des tortues à Pike River pour y recueillir les oeufs, qui sont ensuite placés dans des incubateurs. Les tortues qui naissent ainsi en captivité sont remises à l’eau dans les jours suivant leur sortie de la coquille.
« Évidemment, quand on fait de l’incubation artificielle, notre objectif, c’est que le succès d’éclosion soit plus grand qu’en nature. Il est de 83 % en captivité comparativement à 27 % en nature », souligne Patrick Paré.
Le zoo a remis près d’un millier de spécimens à l’eau depuis 2010.
Ce que l’on sait du monde des tortues, c’est que 5 % d’entre elles vont se rendre à l’âge de la maturité sexuelle [environ 15 ans]. Nos espoirs se fondent donc sur ces individus-là [qui seront relâchés].
Des tortues-molles à épines nées il y a un an seront aussi relâchées prochainement. Elles seront munies d’un émetteur qui permettra aux scientifiques du zoo de situer leur lieu d’hibernation, inconnu à ce jour, contrairement à celui des adultes, déjà bien documenté. Ces informations permettront ainsi de mieux protéger l’endroit.
Ce sujet sera abordé plus en détail lors de l'émission Les années lumière du dimanche 6 août.