Sexe oral protégé : les digues dentaires méconnues et presque impossibles à trouver

La digue dentaire, formée à partir d'un carré de latex, permet de se protéger des ITSS lors de cunnlingus ou d'anulingus.
Photo : Radio-Canada / Karl-Philip Vallée
Vous protégez-vous lors du sexe oral? La question vous a peut-être fait sourire, mais elle est loin d'être banale. Plusieurs infections transmises sexuellement (ITSS) le sont au contact de la bouche. Si la digue dentaire est une barrière toute désignée pour les cunnilingus et les anulingus, son utilisation reste marginale.
Un texte de Thomas Lafontaine
Il suffit de faire une recherche Google pour constater que les digues dentaires n’ont pas la cote. Les personnes curieuses y trouveront des photos se rapprochant davantage de la prévention contre les caries que de prévention contre les ITSS. En utilisant l’équivalent anglais « dental dam », les recherches sont plus fructueuses.
La digue dentaire est pourtant promue dans les ateliers de santé sexuelle. Au ministère de l’Éducation du Québec, elle est considérée comme un des moyens de protection efficaces contre les ITSS. À partir de l’automne prochain, elle sera d’ailleurs présentée dans les salles de classe du Québec, qui a réintroduit les cours d’éducation sexuelle abolis depuis le début des années 2000.
Malgré ces efforts gouvernementaux et communautaires, pourquoi la digue dentaire demeure-t-elle si marginale? Une partie de la réponse se trouve dans l’ignorance que les ITSS se transmettent par voie orale.
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Pas facile de se procurer une digue dentaire. En raison de sa faible utilisation et parce qu'elle n'est pas homologuée par Santé Canada, les pharmacies n’en tiennent pas. Pour en trouver, vous devez passer par une boutique érotique ou encore commander en ligne. Le prix varie de 3 à 5 $ chacune, soit le triple du prix d’un condom.
En raison de ce manque d’accessibilité, les ateliers d’éducation à la sexualité misent sur la fabrication maison de digue dentaire à partir de condoms. La procédure est relativement facile et rapide. De nombreuses vidéos sur Internet en font la démonstration..
Le condom doit être déroulé, coupé aux extrémités, puis découpé dans le sens de la longueur. Comme les condoms sont offerts gratuitement dans plusieurs organismes, les digues dentaires deviennent de facto beaucoup plus accessibles.
Malgré ses vertus, la digue dentaire comporte plusieurs limites. On lui reproche de tenir difficilement en place, notamment celle obtenue à partir du condom, qui offre une moins grande superficie. « Dès que j’essaye d’aspirer le clitoris, la digue vient avec et manque presque de m’étouffer », témoigne Sarah (Nouvelle fenêtre), qui l’a essayé pour le magazine Barbi(e)turix.
La fabrication et l’utilisation de la digue dentaire nuiraient aussi à la tension sexuelle. « Ce n’est pas très glamour. [...] Mais ça peut être très utile, notamment si votre partenaire a une infection et que vous voulez absolument lui faire un cunni », précise Princ(ess)e LGBT dans une vidéo (Nouvelle fenêtre).
Que l’on se protège ou pas lors de relations orales, l’important est de passer régulièrement des tests de dépistage, selon Charlie*, éducateur en santé sexuelle pour À Deux Mains. « Au final, ça revient toujours à connaître son statut, c’est-à-dire si tu as une ITSS ou pas. »
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