Exploitation d'Autochtones dans les champs de betteraves : des témoins se rappellent

Des survivants d'un système d'exploitation des Autochtones présent dans l'Ouest canadien entre 1940 et 1980 dénoncent le traitement dont ils ont été victimes. Le système surnommé « grab-a-hoe Indians » a poussé nombre d'Autochtones à aller travailler dans les fermes de betteraves dans des conditions pénibles entre les mois de mai et d'août.
Rebecca Bone avait 13 ans lorsque sa famille s'est retrouvée dans ce système dans une ferme près d'Altona, dans le sud du Manitoba. Après s'être vu promettre une rémunération et un toit, les travailleurs faisaient face à la réalité : des journées de 12 à 14 heures de travail, pas de nourriture, pas d'eau et un salaire de misère.
Les logements des travailleurs étaient rudimentaires, voire absents, ce qui a forcé les familles autochtones à vivre dans leur camion. À cela s'ajoutait le racisme de la population locale.
Nous travaillions jusqu'à ce que nos mains soient pleines d'ampoules, que notre peau soit brûlée et nous avions toujours faim.
Cette exploitation n'était pas sans précédent, le gouvernement fédéral ayant agi de concert avec l'Alberta et le Manitoba durant la Seconde Guerre mondiale pour recruter des Canadiens d'origine japonaise dans les camps de concentration pour effectuer le même travail. On a permis à ces derniers de partir à la fin de la guerre et c'est à ce moment que les fermiers se sont tournés vers les populations autochtones.
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Les familles, prises dans un cercle vicieux, revenaient chaque année parce que leurs allocations du ministère des Affaires autochtones étaient supprimées s'ils ne travaillaient pas. Le Ministère envoyait de plus des travailleurs sociaux pour enlever les enfants à leur famille lorsque ceux-ci étaient trop nombreux. La seule solution était de se sauver pour aller travailler à la ferme de betteraves.
En 1975, le journal Winnipeg Tribune avait révélé les conditions de vie des Autochtones dans une ferme de Winnipeg. Les travailleurs autochtones ont peu après tenté, en vain, d'obtenir de meilleures conditions de travail. Ces demandes et la mécanisation du travail agricole ont sonné la fin du système d'exploitation des Autochtones vers la moitié des années 1980.
Je me souviens encore des ampoules sur mes mains. Je ne laisserais jamais un enfant faire cela aujourd'hui.
Pour les survivants comme Rebecca Bone qui ont passé une partie de leur jeunesse dans ces fermes, il est impossible d'oublier ces traitements. Ils prennent maintenant la parole pour éviter que l'histoire ne se répète.
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