
Le vérificateur général de l'Alberta procédera à l'audit de deux subventions accordées par les Services de santé de l'Alberta à Pure North S'Energy, une fondation privée qui offre des traitements médicaux alternatifs dont l'efficacité n'a jamais été prouvée.
À la suite d'une demande formulée par l'ancien chef du Parti libéral de la province, David Swann, Merwan Saher affirme que son bureau examinera le processus d’octroi de subventions de façon générale, tout en se penchant de manière particulière sur les subsides versés à Pure North.
Les paiements accordés [à Pure North] qui font l’objet d’un litige seront analysés.
Le bureau du vérificateur général refuse toutefois de mener une étude visant à déterminer si Pure North méritait les subventions octroyées et si les fonds publics dépensés en aide à la fondation servaient les Albertains.

En entrevue avec CBC, M. Swann a dit qu’« il est clair que le vérificateur général fait de ce dossier une priorité » malgré un temps et des ressources limités. « Il observera au moins le processus d’attribution et d’approbation des Services de santé de l'Alberta. Je pense que c’est la chose à faire. »
Pure North a été fondée et financée par le philanthrope de Calgary Allan Markin, cofondateur de Canadian Natural Resources Ltd. L’organisation sans but lucratif dit venir en aide aux plus vulnérables, notamment les sans-abri, les toxicomanes et les aînés, et exploite des cliniques gratuites dans des réserves autochtones et des refuges, entre autres.
CBC indiquait en avril que les Services de santé de l'Alberta avaient octroyé 10 millions de dollars en décembre 2013 pour étendre la portée des programmes médicaux alternatifs de Pure North, qui préconisent notamment un régime fort en vitamine D et l’extraction des plombages à base de mercure.
- Selon des documents obtenus par CBC, des patients dans un refuge de Calgary auraient pu recevoir des doses de vitamine D allant jusqu’à 50 000 unités internationales (UI), tous les deux jours pendant six jours, et ensuite 10 000 UI tous les jours pendant deux mois.
- L’apport quotidien recommandé par Santé Canada est de 600 à 800 UI, et la limite supérieure jugée sécuritaire par le régulateur fédéral est de 4000 UI.
Des subventions accordées malgré les doutes du ministère
Des documents internes du gouvernement montrent que l’ancien ministre progressiste-conservateur de la Santé Fred Horne a approuvé le financement de Pure North en dépit de l’avis contraire de ses fonctionnaires. Ces derniers ont jugé que le programme de la fondation n’est pas assez appuyé par la science, qu’il ne prouve pas les bénéfices médicaux et économiques qu’il revendique et qu’il peut provoquer des effets néfastes chez les patients.
Les documents révèlent également que six jours avant l'attribution de la subvention, l’objectif du financement a été modifié de façon inexpliquée par le ministère, passant d’un projet de recherche à une simple expansion du programme, évitant par le fait même que ce dernier ne fasse l’objet d’une révision éthique.
Le ministère n’a jamais expliqué ce brusque changement dans l’octroi de la subvention.
En 2015, la nouvelle ministre de la Santé néo-démocrate, Sarah Hoffman, a refusé de poursuivre le financement du programme de Pure North, suivant les recommandations du ministère. Mais Mme Hoffman a tout de même octroyé 4,2 millions de dollars à la fondation de M. Markin pour une clinique de soins dirigée par des infirmiers, un projet pilote en partie administré par les Services de santé de l'Alberta.
La ministre a publiquement affirmé qu’elle n’avait eu vent d’aucune controverse concernant le programme de Pure North avant d’approuver les millions destinés à la clinique. Une note obtenue par l’opposition officielle en vertu de la loi d’accès à l’information montre cependant que plusieurs réserves avaient été transmises au bureau de Mme Hoffman un mois avant que la subvention soit allouée.
La ministre a refusé de répondre aux questions de la CBC et de l’opposition à propos de ce qu’elle savait à propos de Pure North.

Elle a également refusé de commenter les activités de lobbying en faveur de Pure North auxquelles le vice-ministre de la Santé, Carl Amrhein, s’est adonné lorsqu’il était un haut fonctionnaire des Services de santé de l'Alberta. Le Wildrose a demandé au commissaire à l’éthique d’enquêter sur l'affaire, mais le bureau du commissaire n’a jamais voulu confirmer ni infirmer s’il procédait à l’examen.
Dans la requête qu’il a envoyée le 5 mai au vérificateur général, David Swann, qui est également médecin, écrit : « [Mon] bureau a mené une révision préliminaire concernant [le programme de Pure North] et après avoir parlé à plusieurs personnes concernées, je crois qu’il y a suffisamment de raisons de s’inquiéter, particulièrement lorsqu’il s’agit de la santé d’une population vulnérable qui pourrait être mise à mal par le programme de suppléments vitaminiques. »
Un audit « fantastique », selon Pure North
Le porte-parole de Pure North, Stephen Carter, a publiquement affirmé que la fondation possédait plusieurs études qui prouvent l’efficacité de son programme. Quelque 50 000 personnes ont participé au programme sans subir de contrecoups, selon lui.
M. Carter se réjouit d’ailleurs de l’audit promis par le vérificateur général.
C’est fantastique!
« Les contrats ont été attribués à la suite d’un processus normal et je suis sûr que le vérificateur général ne trouvera aucun problème avec eux. »
À partir du reportage de Charles Rusnell et Jennie Russell, CBC
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