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Les sables bitumineux, deux à quatre fois plus polluants que prévu

Un bassin de décantation sur un site pétrolier de l'Alberta.

Un bassin de décantation sur un site pétrolier de l'Alberta.

Photo : Reuters

Radio-Canada

Quand on pense aux pétrolières, on pense au CO2, ce gaz à effet de serre qui fait souvent les manchettes, mais on oublie souvent les composés organiques volatils. Ces gaz nocifs pour la santé sont libérés en quantité beaucoup plus importante que ce que l'on croyait par les sables bitumineux de l'Alberta, selon une étude.

Un texte de Camille Martel

L’étude démontre que les méthodes d'évaluation de rejet des polluants sont inadéquates, selon l'auteur principal de l'étude, Shao-Meng Li, d’Environnement et Changement climatique Canada.

« C’est plutôt compliqué d’avoir une idée juste de la concentration des composés organiques volatils », indique le chercheur.

Un composé organique volatil, qu'est-ce que c'est?

Les composés organiques volatils contiennent un ou plusieurs atomes de carbone et ont la caractéristique de s'évaporer facilement dans l'atmosphère. Ils sont reconnus comme étant les principaux responsables du smog.

C’est la première fois qu’une étude évalue avec précision les émissions qui se retrouvent au-dessus des industries pétrolières de l’Alberta.

C’est ce qui explique pourquoi nous avons obtenu des résultats aussi impressionnants.

Une citation de Shao-Meng Li, chercheur, Environnement et Changement climatique Canada

L’équipe d’Environnement et Changement Climatique Canada a passé plus de 80 heures dans un avion modifié en station de recherche au-dessus de six installations pétrolières en Alberta durant l’été 2013.

L'avion utilisé par Environnement et Changement climatique Canada pour faire l'inventaire des émissions polluantes des sables bitumineux de l'Alberta.

L'avion utilisé par Environnement et Changement climatique Canada pour faire l'inventaire des émissions polluantes des sables bitumineux de l'Alberta.

Photo : Shao-Meng Li

Les chercheurs ont volé autour des installations pétrolières en effectuant des cercles à différentes altitudes. « On a créé une espèce de mur virtuel si on veut », décrit Shao-Meng Li.

Ainsi, ils ont pu capter des échantillons d’air toutes les 2 secondes à l’aide de leur matériel. Toutes ces données ont permis de recenser de 69 à 89 composés organiques volatils différents.

Nous en avons trouvé beaucoup plus que ce qui est indiqué dans l’Inventaire national des rejets des polluants.

Une citation de Shao-Meng Li, chercheur, Environnement et Changement climatique Canada

L’étude a aussi démontré que, dans certains cas, jusqu'à 50 composés organiques volatils différents n’étaient pas signalés au registre du gouvernement, alors qu’ils doivent l’être, selon l’Inventaire national des rejets de polluants (INRP).

« Les rapports faits annuellement par les pétrolières ne sont pas vérifiés », explique Shao-Meng Li.


Pas une méthode viable, selon la province et le gouvernement fédéral

L'INRP, qui est chargé de recueillir les rapports faits par les industries annuellement, n’entend pas changer pour autant les méthodes d’évaluations des rejets atmosphériques.

Ce ne serait pas raisonnable de demander à l’industrie de faire des inventaires aériens.

Une citation de Jody Rosenberger, chef d'unité, Inventaire national des rejets de polluants

De plus, des études aussi complètes ne sont pas requises par la Loi canadienne sur la protection de l’environnement, ajoute-t-il.

Comment évalue-t-on les émissions des pétrolières ?

Les sables bitumineux de l'Alberta doivent signaler annuellement leurs émissions polluantes à l'Inventaire national de rejets des polluants. Habituellement, cet inventaire est fait « du bas vers le haut », c'est-à-dire que les émissions sont captées et évaluées à partir du sol. La plupart des rejets sont estimés. Ainsi, si on sait qu'un camion a parcouru un certain nombre de kilomètres pendant l'année ou que telle cheminée a fonctionné pendant un certain nombre d'heures, on applique des facteurs préétablis pour estimer le rejet total. Toutefois, les installations pétrolières ont des procédés très complexes qui ne sont pas tous pris en compte dans ces estimations.

M. Rosenberger a spécifié cependant que, si l’Inventaire national des polluants juge que certains polluants sont mal signalés par les industries, certaines méthodes de collectes pourraient être modifiées.

L'intérieur de l'avion qui a fait l'inventaire des émissions polluantes au-dessus des sables bitumineux de l'Alberta.

L'intérieur de l'avion qui a fait l'inventaire des émissions polluantes au-dessus des sables bitumineux de l'Alberta.

Photo : Shao-Meng Li

Même son de cloche du côté de la province albertaine, qui estime que cette méthode de recensement des polluants est trop laborieuse.

« C’est tout de même positif d’avoir ces nouvelles informations », laisse entendre Bob Myrick, directeur du contrôle de la qualité de l’air pour le ministère de l’Environnement et des Parcs de l’Alberta.

Celui-ci estime que l’étude met en lumière certaines lacunes dans le processus d’inventaire des polluants et que, conséquemment, plus de composés chimiques devraient être pris en compte lorsque les industries signalent leurs émissions.

Or, ni la province ni le gouvernement fédéral n'entendent demander aux industries de modifier l’inventaire qu’ils font de leurs émissions de polluants atmosphériques.

Une deuxième étude similaire sera menée durant l'été 2018 pour valider les données.

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