Trump promet à ses producteurs laitiers un commerce plus équitable avec le Canada

Le président des États-Unis, Donald Trump, prononce un discours au siège social du fabricant d’outils Snap-On, au Wisconsin, avant de signer le décret « Acheter américain, embaucher américain ».
Photo : Reuters / Kevin Lamarque
Prenez note que cet article publié en 2017 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
L'entente entre les producteurs et les transformateurs laitiers canadiens afin de favoriser le lait diafiltré d'ici irrite au plus haut point le président des États-Unis, Donald Trump.
En vertu de l’actuel système de gestion de l’offre qui encadre la production laitière au Canada, seule une infime quantité de lait américain peut franchir les frontières canadiennes.
Le lait diafiltré est un produit très riche en protéines qui entre dans la fabrication du yogourt et du fromage.
La politique de prix adoptée en avril par l'Ontario nuit aux exportateurs américains de lait diafiltré. Elle a entraîné la perte de milliers d'emplois aux États-Unis, notamment dans les États frontaliers comme le Wisconsin et New York.
Cette politique permet aux transformateurs laitiers canadiens d'acheter du lait canadien au prix en vigueur sur le marché mondial. Il est inférieur à celui proposé par le système national de gestion de l'offre. Pour les producteurs américains, cette mesure donne un incitatif aux transformateurs canadiens de réduire leurs importations laitières.
Dans un discours prononcé au Wisconsin, mardi, le président des États-Unis a promis aux producteurs laitiers de cet État de revoir les accords commerciaux avec le Canada, qu’il a qualifiés d’« injustes ».
« Cette situation exige du commerce équitable avec tous nos partenaires. Et cela inclut le Canada. Ce pays a des pratiques commerciales très inéquitables face à nos producteurs laitiers », a-t-il dit.
« Nous allons appeler le Canada et leur demander "qu'est-ce qui se passe?" » a-t-il lancé à la foule réunie pour l'entendre parler de la signature du décret « Acheter américain, embaucher américain », qui doit donner un avantage aux produits et aux citoyens des États-Unis pour tout projet fédéral.
Ce qui vous est arrivé est très, très injuste. C'est le genre d'accord typiquement partial, contre les États-Unis. Et ça ne durera pas.
Environ 70 producteurs des États du Wisconsin et de New York sont touchés par cette décision.
Les producteurs du Wisconsin demandent depuis plusieurs mois un libre accès au marché canadien. Ils affirment que cette pratique du Canada a entraîné des pertes de ventes de 150 millions de dollars américains.
Donald Trump a promis de travailler avec les représentants au congrès du Wisconsin afin de trouver une solution.
Une brèche dans la gestion de l'offre?
Les producteurs laitiers du Canada ont rapidement réagi à cette promesse du président Trump. « On est confiant que le gouvernement du Canada va défendre son industrie laitière », a déclaré leur porte-parole.
En entrevue à Radio-Canada, le président de la Fédération des producteurs de lait du Québec, Bruno Letendre, s'est montré préoccupé par cette sortie de Donald Trump, qui pourrait entraîner des brèches dans la gestion de l'offre.
« S'il y avait seulement les produits laitiers qui étaient plus chers au Canada qu'aux États-Unis. Or, ce n'est pas le cas. Le porc, le boeuf et les céréales sont plus chers ici qu'au sud de la frontière », réplique M. Letendre aux pourfendeurs de la gestion de l'offre.

Vaches laitières à l'heure de la traite
Photo : iStock
Philippe Couillard à la défense des agriculteurs
« Ce n'est pas la première fois que la gestion de l'offre est ciblée. Cela a été le cas dans toutes les négociations commerciales que le Canada et le Québec ont eues. On va être aux côtés de nos agriculteurs pour défendre la gestion de l'offre », a dit le premier ministre du Québec, Philippe Couillard, qui annonçait la nomination du candidat libéral lors de l'élection partielle dans Gouin, à Montréal.
M. Couillard affirme qu'en se portant à la défense de la gestion de l'offre, il défend la ferme familiale et le droit des jeunes de choisir un mode de vie rural en agriculture sans avoir à bâtir des structures industrielles « qui ne leur ressemble pas ».
« Les États-Unis sont un pays qui subventionne énormément son agriculture », a-t-il ajouté.
Dans une lettre adressée aux gouverneurs des États du Wisconsin et de New York – respectivement Scott Walker et Andrew Cuomo, l'ambassadeur du Canada aux États-Unis, David MacNaughton, affirme que le Canada n'accepte pas la prétention américaine selon laquelle les politiques laitières canadiennes sont à l'origine des pertes des producteurs laitiers américains.
L'ambassadeur ajoute que le Canada n'a pas pris d'actions afin de limiter les importations provenant des États-Unis. « L'industrie laitière canadienne est moins protectionniste que celle des États-Unis, qui érige des barrières techniques afin d'exclure les produits laitiers canadiens de son marché. Le Canada importe 6,3 % de ses fromages et 10 % de son beurre, tandis que les États-Unis importent 3 % de ses fromages et 3 % de son beurre », écrit M. MacNaughton.
L'ambassadeur termine en écrivant que le gouvernement canadien appuie le système de la gestion de l'offre, les producteurs laitiers et l'ensemble de l'industrie laitière canadienne.
Une attaque contre l’ALENA
Dans son discours, Donald Trump s'est également plaint des règles de l'ALENA, qui ralentissent tout processus de changement.
« Nous allons faire de très grands changements ou nous allons nous débarrasser de l'ALENA une bonne fois pour toutes. On ne peut pas continuer comme ça, croyez-moi », a-t-il lancé.
Jusqu'à maintenant, le gouvernement canadien s'était rasséréné en entendant le président américain attaquer surtout son voisin mexicain au sujet de l'ALENA, allant même jusqu'à dire au premier ministre Justin Trudeau, lors de sa visite à Washington, que les États-Unis ne feraient que quelques « ajustements mineurs » à la partie de l'accord commercial qui les lie au Canada.
En fin de journée mardi, le ministre canadien de l'Agriculture rédigeait sa réaction au discours du président américain.
Avec les informations de La Presse canadienne