Québec annonce la nomination de 18 juges

La ministre de la Justice du Québec, Stéphanie Vallée
Photo : Radio-Canada
Prenez note que cet article publié en 2017 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
La ministre de la Justice, Stéphanie Vallée, et le ministre de la Sécurité publique, Martin Coiteux, espèrent que la nomination de 18 juges à la Cour du Québec contribuera à réduire les délais des procédures judiciaires.
Ces délais sont devenus un sujet d'actualité depuis l'arrêt Jordan, une décision rendue en juillet 2016 par la Cour suprême du Canada en vertu de laquelle la Cour supérieure dispose de 30 mois au plus pour mener à bien un procès criminel, et la Cour du Québec, d'au plus 18 mois.
Au-delà de ces normes, les délais sont jugés déraisonnables, ce qui a permis à des accusés de s'adresser aux tribunaux pour obtenir un arrêt des procédures.
L’arrêt Jordan l’a dit très bien : il y a une culture des délais [judiciaires] qui s’étaient instaurés. Il y avait des tolérances aussi à l’égard de certains délais qui s’étaient instaurés dans le système et qu’on ne peut plus tolérer.
Pour y remédier, l’Assemblée nationale a adopté, en décembre dernier, une législation qui a modifié la Loi sur les tribunaux judiciaires. Cette loi était assortie d’une enveloppe de 175 millions de dollars sur quatre ans.
Évoquant un « exploit », la ministre de la Justice estime que ces nominations auront « un effet significatif sur la capacité de traitement de notre système de justice ».
On commence déjà à sentir les efforts des ajouts et à sentir l’effet d’une prise de conscience du milieu judiciaire [par rapport à la situation].
« Il y a des milliers de dossiers qui sont en jeu », a expliqué la ministre, ajoutant que vendredi dernier, il y avait « 684 requêtes pour délais qui sont pendantes, soit en matière criminelle ou en matière pénale ».
Québec espère traiter 10 000 dossiers additionnels par année avec son plan d'action.

Stéphanie Vallée a profité de l’occasion pour faire une mise à jour du plan d’action présenté en décembre :
- Le gouvernement a embauché 52 procureurs à la Direction des poursuites criminelles et pénales (l’objectif était de 45);
- Des 132 nouveaux effectifs prévus au service de la justice, notamment au service de la magistrature, 101 postes ont été pourvus;
- Des 47 postes au Bureau des infractions et des amendes, 28 ont été comblés et 15 sont en dotation;
- Les 38 postes d’agents aux services correctionnels sont tous pourvus. Même chose pour les 16 postes de constables spéciaux et les 32 d’agents de probation.
Mme Vallée a par ailleurs souligné que son gouvernement poursuivait ses discussions avec Ottawa afin de nommer huit juges à la Cour supérieure et deux juges à la Cour d’appel.
« J’ai multiplié les demandes et les représentations auprès de ma collègue [Jody Wilson-Raybould, ministre fédérale de la Justice]. Je la sais préoccupée par les impacts de l’arrêt Jordan. Le personnel de soutien est là, les sommes additionnelles sont au rendez-vous. J’ose espérer que le gouvernement fédéral sera en mesure de procéder aux nominations le plus rapidement possible », a indiqué la ministre Vallée.
En matière criminelle, la Cour du Québec est le tribunal qui prend en charge la majorité des dossiers.
La Cour supérieure du Québec entend les causes qui sont entendues devant un juge et un jury, soit lorsque les accusations sont très graves comme le meurtre ou le gangstérisme.
Pas une solution instantanée, dit le Barreau
Le vice-président du Barreau du Québec ne croit pas que la nomination de juges réglera rapidement le problème des délais judiciaires. « On fait un rattrapage. Ça fait des années que le Barreau dit que les nominations de juges ne suivent pas la parade », soutient Antoine Aylwin.
Il a également indiqué que le gouvernement du Québec doit donner plus ressources à l'aide juridique pour lequel travaillent les avocats de la défense.
Il explique que ce sont souvent les avocats de la défense qui sont nommés juges ou avocats de la Couronne. La nomination de nouveaux juges entraînera donc une baisse de leur nombre, ce qui paralysera également le système judiciaire.
On a une salle, un juge, un avocat de la Couronne, mais si on n’a pas un avocat pour représenter l’accusé, on ne peut pas plus procéder qu’avant.
« L’arrêt Jordan a donné un coup de barre : du jour au lendemain, il fallait changer les délais. Mais c’est tout le système qui doit se mettre à niveau. Les avocats, il faut les former. Les juges, il faut les former. Donc il y a un délai pour que tout le système se mette à niveau pour qu’on ait suffisamment de ressources », renchérit-il.
La ministre Vallée a toutefois souligné, lors d'une entrevue à l'émission 24/60, que le gouvernement en « est à évaluer les besoins de ressources à l’aide juridique ».
Des statistiques judiciaires à venir?
« Il y a un gros problème dans notre système en ce moment, c’est l’accessibilité des statistiques judiciaires », a renchéri le vice-président du Barreau du Québec.
Cela empêche le Barreau d'évaluer l'efficacité du système judiciaire québécois. « On a de la misère à avoir des comparatifs », rappelle Antoine Aylwin.
À cela, la ministre de la Justice du Québec a aussi répondu que le gouvernement allait se pencher sur la question, soulignant que la Cour du Québec a publié en ligne les données sur les délais aux petites créances. « C'est un premier pas », a-t-elle dit.