De Dublin à Bellevue : l’enseignant Criostoir O Huigin partage sa culture avec de jeunes Fransaskois
Criostoir O Huigin dans sa salle de classe à l'école St-Isidore à Bellevue
Photo : Radio-Canada / Nicole Lavergne-Smith
On se sent bien dans la classe de Criostoir O Huigin à l'école St-Isidore à Bellevue. Il est évident que l'enseignant au débit rapide, rempli d'énergie, aime ses élèves et que le sentiment est réciproque.
Un texte de la Fureteuse fransaskoise Nicole Lavergne-Smith
Les jeunes Fransaskois de Bellevue en connaissent probablement plus sur l’Irlande que les autres élèves du Conseil des écoles fransaskoises, car leur enseignant originaire de Dublin n’attend pas la Saint-Patrick pour partager sa culture et sa langue avec ses élèves.
« Ça fait partie de ma vie, je ne peux pas l’éviter »
Ses activités irlandaises prennent toutefois plus d’ampleur au mois de mars. Il prépare cette année un rassemblement où les élèves présenteront des danses celtiques et gaéliques ainsi qu'un spectacle de flûte irlandaise au foyer de Bellevue.
Après les heures de classe, il participera à une soirée d’ailes de poulet organisée au centre communautaire pour célébrer la Saint-Patrick. « Je vais sortir avec la communauté prendre un verre et avoir un bon temps ».
L’apprentissage du français en Irlande
Même s'il est très passionné par sa langue et sa culture, il s'intéresse aussi à celles des autres. Au secondaire, il a décidé d'apprendre le français, mais il n’y avait plus de place dans le cours. Débrouillard, il s’est trouvé un tuteur québécois, originaire de Trois-Rivières, pour lui enseigner.
Il a continué ses études en français à l’université et s’est même trouvé des emplois en français l’été.
C’est l’occasion d’enseigner l'irlandais au Canada dans le cadre d’un programme de la Fondation universitaire Irlande-Canada qui l'a amené à l’Université de Fredericton en 2011. Il était attiré par le Nouveau-Brunswick, une province bilingue, qu’il avait étudié lors de sa maîtrise en politique linguistique.
Après le programme, il a décidé de rester au Canada. Avec ses nouveaux amis, c’était l’accent acadien qu’il commençait tranquillement à absorber. « Mon français est vraiment mêlé, mais cela a toujours été autour de moi, par accident et par exprès. »

Criostoir O Huigin est enseignant à Bellevue depuis 2015. Il aime partager sa culture irlandaise avec ses élèves.
Un emploi à Bellevue
C’est lors d’une foire de l’emploi au Nouveau-Brunswick qu’il a rencontré une représentante des ressources humaines du Conseil des écoles fransaskoises. Il n'a pas pu refuser l'offre d’emploi qu'il a reçue pour Bellevue.
Tard dans la nuit, en août 2015, il est arrivé à Bellevue avec sa mère, venue pour l'aider à déménager. La directrice de l'école, Janine Bussière, les conduisait sur le chemin pas pavé.
« On a regardé autour et on s'est dit "où va-t-on là?" Oh la la! On ne pouvait rien voir et Madame Janine a dit " moi non plus je ne peux rien voir, mais je sais que le chemin est tout droit". Je n’étais pas bouleversé, mais c’était quelque chose de nouveau pour moi. »
Janine Bussière lui a fait faire une tournée du village en 10 secondes [!] et elle l’a amené à une toute petite maison, qui est depuis, la sienne.
Aujourd’hui, il se sent bien dans le village. Il s’est fait de bons amis et connaît bien la région. Ses élèves s’intéressent aussi beaucoup à la culture irlandaise et tout ce qu’il leur présente. « Je suis chanceux », dit-il avec un sourire.
Il est résident permanent au Canada depuis janvier dernier et aimerait continuer sa carrière au pays, même s’il est difficile d’être loin de chez lui.
« C’est comme avoir deux assiettes. Tu as deux morceaux de viande puis tu veux manger les deux, mais tu ne peux pas. »
Un Irlandais fier
Sa mère lui a toujours parlé en irlandais et en anglais. Il est allé à une école anglophone, mais suivait le cours obligatoire d’irlandais comme tous les élèves du pays.
Il a décidé de s’y dédier plus sérieusement à l’âge de 16 ans, en faisant de la lecture uniquement en irlandais [gaélique irlandais].
Pour lui, la langue, parlée couramment par peu de gens, est devenue une passion.
« Je sais qu'un jour quand j’aurai des enfants que ça sera en irlandais avec eux. Le monde de Bellevue dit que c’est plus dur à faire qu'à dire. Pour moi, ce n’est pas une question. Je sais que je suis capable de le faire et j’ai hâte de le prouver un jour. »
