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Cette entente qui incite à traverser irrégulièrement la frontière

Deux hommes marchent sur des rails de chemin de fer en pleine nuit.

Un groupe de migrants qui disent venir de Djibouti et de la Somalie viennent de traverser la frontière canado-américaine à Emerson, au Manitoba, le 27 mai 2017.

Photo : Radio-Canada / Chris Wattie

Radio-Canada

L'entente des tiers pays sûrs, un accord canado-américain sur les demandeurs d'asile, sème plus que jamais la controverse. On le dit responsable de la forte hausse des passages irréguliers à la frontière canadienne. Explications.

Un texte de Danielle Beaudoin

Comparativement à l'an dernier, trois fois plus de personnes ont traversé irrégulièrement la frontière entre les États-Unis et le Québec cet hiver, et les autorités s'attendent à un flux encore plus grand avec l'arrivée du beau temps.

Ces migrants entrent clandestinement au Canada parce qu'ils craignent d'être automatiquement refoulés aux États-Unis s'ils se présentent à un poste frontalier pour demander asile. Ils contournent ainsi l'entente sur les tiers pays sûrs.

En vertu de celle-ci, le Canada et les États-Unis partent avec la prémisse qu’ils sont tous les deux des pays sûrs pour les réfugiés. Ainsi, les migrants sont tenus de présenter leur demande d’asile dans le premier pays où ils arrivent, que ce soit le Canada ou les États-Unis.

Donc, si un migrant en provenance des États-Unis se présente aux douanes canadiennes pour demander asile, il sera renvoyé immédiatement aux États-Unis pour y faire sa demande. Certaines exceptions existent, par exemple pour ceux qui ont de la famille au Canada ou pour les enfants non accompagnés.

L’entente des tiers pays sûrs s’applique strictement aux personnes qui se présentent aux postes frontaliers. Les gens qui arrivent à passer la frontière irrégulièrement ne sont donc pas touchés par cette entente. Une fois arrivés au Canada, ils peuvent alors présenter leur demande d’asile.

Abandonner l'entente?

Cette entente est critiquée depuis son entrée en vigueur en 2004. Trois organismes, Amnistie internationale, le Conseil canadien des réfugiés et le Conseil canadien des Églises, ont contesté en 2005 devant les tribunaux la désignation des États-Unis comme tiers pays sûr. La Cour fédérale leur a donné raison en 2007, en convenant que les États-Unis n’étaient peut-être pas sécuritaires pour tous les réfugiés. Cette décision a été infirmée en appel l’année suivante.


En juillet 2017, ces trois groupes ont récidivé. Ils ont de nouveau demandé à la Cour fédérale de se prononcer. Ils font valoir que le renvoi des demandeurs d’asile aux États-Unis est inapproprié et peut mener là-bas à des violations des droits de la personne.

L'entente a aussi été critiquée par quelque 200 professeurs canadiens de droit. Dans une lettre envoyée au ministre de l’Immigration en janvier 2017, ils ont fait valoir que les États-Unis ne devraient plus être considérés comme un pays sûr en raison du décret du président Trump sur l'immigration.

Le représentant du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés à Ottawa, Jean-Nicolas Beuze, s'est pour sa part montré prudent quant à une suspension de l'entente. Les preuves sont insuffisantes, a-t-il déclaré en février 2017, pour conclure que les nouvelles politiques sur l'immigration aux États-Unis instaurées par Donald Trump influençaient leur programme d'accueil des réfugiés.

Ottawa défend l’accord

Le Parti québécois fait partie de ceux qui exigent la suspension de l'entente sur les tiers pays sûrs. Le gouvernement Couillard demande plutôt une aide financière de 146 millions de dollars à Ottawa pour l'accueil des réfugiés en 2017.

Jusqu'ici, le gouvernement fédéral a balayé du revers de la main les nombreuses critiques contre cet accord. Le député fédéral Marc Miller a notamment défendu l'entente l'été dernier, en avançant qu'elle « a fait ses preuves » et demeure « une façon très efficace de gérer les dossiers de réfugiés entre deux grands pays ».

À la Chambre des communes, les principaux partis ne s'entendent pas. Le Nouveau Parti démocratique souhaite que l'entente soit abandonnée, alors que le Parti conservateur demande plutôt au gouvernement Trudeau d'augmenter le contrôle aux frontières.

 

MISE AU POINT
Dans une version précédente de ce texte, nous employions l'expression « entrée illégale » pour désigner l'entrée irrégulière des demandeurs d'asile dont il est question ici.
S'il est vrai que ces individus sont, pour la plupart, entrés de manière irrégulière au Canada, ils n'en sont pas pour autant illégaux ou clandestins.
Par souci d'exactitude, Radio-Canada privilégie l'expression demandeur d'asile quand il est question de ces personnes.

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