L'unicité des flocons de neige
Avez-vous déjà examiné les flocons de neige qui échouent sur votre mitaine? En avez-vous déjà trouvé deux identiques?
Les flocons sont tous de forme hexagonale; c'est normal, la structure moléculaire de l’eau se cristallisant à basse température mène toujours à cette configuration à six branches.
Mais en fait, au niveau atomique, ils sont toujours différents. Les molécules d’eau qui les forment sont toujours constituées de deux atomes d’hydrogène et d’un seul d’oxygène, mais parfois le nombre de neutrons dans l’atome d’oxygène diffère : il y en a 16 ou 18.
Si la preuve mathématique le dit
Le mathématicien américain Eric Weisstein a énoncé une formule permettant de calculer la probabilité que deux flocons soient identiques. N’ayez crainte : on n’entrera pas dans les détails. Sachons seulement qu'après quelques approximations, comme on le fait souvent en science, on peut conclure que la probabilité de trouver deux flocons identiques est de 0,00…1 (avec 700 zéros après la virgule).
En termes clairs, c’est extrêmement improbable. Vous doutez? Vous pouvez toujours tenter de trouver deux flocons identiques… envers et contre les mathématiques! Mais avant de vous y mettre, prenez le temps de lire la petite histoire de l'étude des flocons de neige.
Il était une fois
L’un des premiers scientifiques à s’intéresser à la symétrie hexagonale des flocons est l’astronome allemand Johannes Kepler; il y voyait une analogie avec les alvéoles d’une ruche. En 1611, il rédige un premier traité sur l’étude des cristaux de neige appelé L’étrenne ou la neige sexangulaire.
Peu après, en 1635, René Descartes, physicien et mathématicien français, observe les flocons et réalise sur papier, sans trop grande précision toutefois, des représentations schématiques de différentes formes de cristaux (Nouvelle fenêtre) dont certaines étaient assez complexes.
Et 30 ans plus tard, le scientifique anglais Robert Hooke profite d’un nouvel instrument d’observation, le microscope, pour constater l’extrême complexité des cristaux de neige. Il raffine les schémas déjà publiés qu’il présente dans son traité scientifique Micrographia en 1665.
Les premières photos
Le premier photographe mondial de flocons de neige est un fermier d’une petite ville du Vermont, Wilson Bentley (Nouvelle fenêtre). Dès son adolescence, il s'intéresse aux cristaux de neige et développe une technique pour les attraper à l’aide d’une plume. Il dessine ensuite ce qu'il voit dans un microscope. Évidemment, les cristaux fondent trop rapidement et la plupart ne peuvent être dessinés.
Il modifie alors son microscope et perfectionne un procédé où il peut photographier les flocons sur du velours noir avant qu’ils ne deviennent liquides. C’est ainsi qu’il réalise sa première photographie d’un flocon de neige, le 15 janvier 1885.
Durant sa vie, M. Bentley réalise plus de 5000 images de cristaux qu’il décrit comme des « petits miracles de beauté ». Il découvre ainsi les différents motifs hexagonaux, bien sûr, mais aussi en forme de triangle, d’aiguille ou de colonne. Auteur de plusieurs articles, il affirme dans l’un d’entre eux qu’il n’y a pas deux flocons de neige identiques.
À la fin du 19e siècle, ses travaux suscitent la curiosité et ses photos font fureur et sont demandées dans le monde entier.
En plus de s’intéresser aux flocons, M. Bentley élargit ses horizons et photographie aussi les formes de glace et de formation d’eau naturelle, y compris les nuages et le brouillard. Il est l’un des premiers Américains à s’intéresser aux gouttes d’eau et l’un des premiers physiciens des nuages. Son ouvrage Snow crystals, publié juste avant sa mort, en 1931, regroupant 2500 photographies, est un mélange de sciences et d’art.
Des flocons artificiels
Dans les années 1930, c'est au tour d'Ukichiro Nakaya, physicien japonais et spécialiste en glaciologie, de s’intéresser aux flocons et aux cristaux de neige.
En 1935, il ouvre son propre laboratoire de la science des basses températures. En mars 1936, il crée le premier flocon de neige artificiel dans des conditions contrôlées (Nouvelle fenêtre) et constate que la forme des cristaux dépend de la température et de la saturation en eau.
Sa citation la plus célèbre en dit beaucoup sur sa passion : « Les flocons de neige sont comme des lettres envoyées du ciel ». La majeure partie des travaux d'Ukichiro Nakaya se trouvent dans le livre Snow crystals : natural and artificial paru en 1954.
Classification des flocons
Il n’est vraiment pas évident de classifier les flocons de neige, car tout dépend des critères que s’imposent les comités de classement.
Au début des années 50, la Commission internationale de la neige et de la glace a réalisé un système de classification simple qui définit les sept types principaux de cristaux de neige : plaquette, étoile, colonne, aiguille, dendrite (cristal ramifié, en forme d’arbre avec un tronc et des branches), colonne coiffée et formes irrégulières, auxquels on ajoute les précipitations congelées comme le grésil, les grains de neige et la grêle.
C'est Ukichiro Nakaya, en 1954, qui effectue la première classification systématique des flocons en 41 types morphologiques (Nouvelle fenêtre) différents à partir de 3000 photos.
Puis en 1966, deux météorologues, C. Magono et C.W. Lee, publient une classification basée sur celle de Nakaya, mais un peu plus complexe, représentant 80 différents cristaux de neige, y compris certains en 3D.
L’œuvre de Nakaya est poursuivie de nos jours par un autre passionné du flocon, Kenneth Libbrecht, professeur de physique à l’Université Caltech, en Californie. Ses expériences de création de flocons en laboratoire lui ont permis de conclure qu’une croissance très lente donne naissance aux flocons en plaquettes, aux colonnes et aux autres formes anguleuses, alors qu’une croissance rapide forme des flocons étoilés. Son site Internet SnowCrystals.com (Nouvelle fenêtre) propose d’étonnantes illustrations des diverses formes, entre autres informations.
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