De la cave au clocher : la face cachée de la cathédrale
Nicolas Beaudry, professeur à l'UQAR, explique comment plus de 150 ans de travaux et d'interventions successives ont laissé des traces sous la cathédrale.
Photo : Radio-Canada / Denis Castonguay
Une équipe de Radio-Canada a eu le privilège de visiter les recoins de la cathédrale Saint-Germain de Rimouski pour constater l'état du bâtiment et découvrir la valeur historique et patrimoniale de l'édifice.
Un photoreportage de Denis Castonguay
Lors de cette visite exclusive, nous étions accompagnés de trois chercheurs du Laboratoire d’archéologie et de patrimoine de l’UQAR qui préparent un ouvrage collectif pour faire le point sur l’état des connaissances relativement à ce monument :
- Nicolas Beaudry, professeur d'histoire et d'archéologie du Département des lettres et humanités à l'UQAR;
- Jean-René Thuot, professeur d'histoire du Département des lettres et humanités à l'UQAR;
- Kurt Vignola, professeur d'histoire au Cégep de Rimouski et codirecteur de la revue L'Estuaire.
C'est le président de la Fabrique Saint-Germain de Rimouski, Normand Lavoie, qui nous a ouvert les portes de la cathédrale. À cause des règles de sécurité, les visiteurs doivent en tout temps porter un équipement de protection adéquat.
Accès rapide :
La cathédrale est une spacieuse église qui peut accueillir environ 1000 personnes. Les dommages causés par l'humidité et l'infiltration d'eau sont particulièrement visibles sur la voûte et autour des fenêtres. Depuis le portique, on a une vue d'ensemble de la nef et du choeur de la cathédrale, avec l'orgue Casavant et une partie de ses 4500 tuyaux, au fond. On distingue nettement la voûte principale (haut-vaisseau), d'une hauteur de 28 mètres, et les voûtes latérales (collatéraux), hautes de 18 mètres. Trois vitraux sont disposés au sommet de la nef.
Les premiers signe de détérioration sont visibles au plafond du porche, du côté de la rue Saint-Germain. La situation est semblable en plusieurs endroits du bâtiment.
L'humidité à l'intérieur des murs a causé des dommages au bas des fenêtres, où la dégradation est évidente.
Ce tabernacle conçu par l'architecte et maître-sculpteur François-Thomas Baillargé est encore dans la cathédrale. Il a surmonté le maître-autel de l'ancienne église de Rimouski, de 1833 à 1862, puis celui de la cathédrale de 1862 à 1909. La cathèdre, appelée aussi trône de l'évêque, des tableaux et l'orgue Casavant se trouvent aussi dans la cathédrale.
Le président de la Fabrique Saint-Germain, Normand Lavoie, montre des vêtements portés par l'archevêque lors de différents rituels. Ceux-ci ont été conservés dans l'édifice.
Une visite du sous-sol permet de saisir l'ampleur des transformations effectuées au fil des années. L'édifice a été agrandi, son sous-sol a été réaménagé à plusieurs reprises et les planchers des nefs ont été remplacés par une dalle de béton en 1967. Les structures de pierre qui portaient les planchers d'origine sont préservées en grande partie. Elles cohabitent avec des structures plus récentes qui témoignent de l'histoire du bâtiment.
De nombreux piliers en béton ont été mis en place lors des rénovations pour soutenir le nouveau plancher de la cathédrale. Les travaux ont nécessité le déplacement des restes de paroissiens qui avaient été inhumés sous le plancher de l'église, une pratique courante au XIXe siècle. De petits drapeaux, visibles en quelques endroits dans le sous-sol, indiquent la présence d'ossements humains à la surface du sol.
Le système de chauffage de la cathédrale est alimenté à partir de l'édifice voisin, le Conservatoire de Rimouski. Bien que la cathédrale soit fermée au public, la température de l'édifice est maintenue à un niveau suffisant pour prévenir de plus amples dommages.
La soufflerie de l'orgue Casavant est installée installée au sous-sol.
L'ancienne crypte où étaient conservées les dépouilles de membres du clergé a maintenant une autre vocation. On y range des outils et du matériel de construction.
Une longue échelle en métal permet d'atteindre le triforium. Derrière les ouvertures en arche qui ceinturent la nef, ce passage dissimulé permet de circuler autour de l'édifice. Le triforium est interdit au public. Il permet au personnel d'entretien d'accéder aux parties supérieures du bâtiment (combles et clocher).
À partir de la galerie, on a une vue globale de la nef qui permet d'en apprécier la composition architecturale.
Le triforium cache mal son âge. Une structure de bois a été ajoutée pour supporter par endroits le plafond, en piteux état.
Les dommages au plafond sont causés par l'infiltration d'eau provenant des combles.
Cet espace est situé entre la toiture et le plafond des voûtes latérales, de chaque côté de la voûte centrale. Un passage rudimentaire permet de circuler dans les combles de chaque côté du bâtiment. Certaines parties sont recouvertes d'une pellicule plastique pour empêcher l'eau d'endommager l'étage inférieur.
Des seaux sont disposés un peu partout pour recueillir l'eau qui dégoutte du toit.
La toiture de la cathédrale est percée de plusieurs fenêtres inclinées qui laissent passer la lumière, mais qui sont aussi une source d'infiltration d'eau. La structure de bois de la toiture montre des signes évidents d'humidité.
Le bois de la toiture est abîmé par l'humidité, ce qui n'aide en rien à préserver l'édifice.
Les fenêtres qui permettent à la lumière naturelle d'éclairer la nef sont une source de condensation. Elles ont été colmatées au fil du temps, mais le problème persiste.
L'accès au clocher se fait en empruntant une série d'échelles à partir des combles. Le coq qui trône au sommet de la flèche de la cathédrale veille sur la paroisse à 69 mètres (225 pieds) du sol.
La partie supérieure du clocher est une structure de bois qui repose sur les murs de pierres. La structure du clocher n'a guère changé depuis sa réédification en1891, alors que les trois cloches ont été installées.
La structure du clocher est en partie assemblée avec de bonnes vieilles chevilles de bois.
Nicolas Beaudry soulève la trappe pour accéder à l'extérieur du clocher, où est situé le carillon.
Les trois cloches, appelées Marie-Joseph, Jeanne et Germaine, ont été fabriquées en Angleterre par la fonderie Mears & Stainbank, de Londres. On n'actionne plus le carillon de la cathédrale depuis quelques années parce que le mouvement des lourdes cloches, d'un poids total de 1641 kg, risque d'endommager le clocher. Du temps qu'elles sonnaient encore, les cloches étaient actionnées mécaniquement.
Chaque cloche porte des inscriptions détaillées pour indiquer le nom de la fonderie, sa date de fabrication et sa dénomination. Celle-ci porte le nom de Germaine et l'inscription « Gloire au St-Esprit et honneur à St-Germain ». Son poids est de 432 kg et la note qu'elle produit est un LA.