La nutritionniste Geneviève O’Gleman vient de lancer Réconfort sans effort, juste à temps pour les journées plus fraîches. Elle nous y propose des recettes parfaites pour cuisiner de bons petits plats sans se casser la tête et sans salir trop de vaisselle. Nous avons discuté de son processus créatif, de la conception du livre et de quelques recettes bien spéciales.
1. Comment te sens-tu après ce lancement?
Fébrile! Et tellement touchée, car je commence à voir le livre apparaître sur les réseaux sociaux. On commente nos publications et on nous dit que le livre est acheté. Même si c’est mon seizième lancement, c’est excitant comme ça l’était pour le premier. Je me sens privilégiée que le livre trouve preneur et que les gens l’attendent. Ça représente une année complète de travail, et là, c’est l’aboutissement du projet. De savoir que le livre vivra dans d’autres maisons que la mienne… c’est très spécial comme sensation : ça va sentir bon chez les gens grâce à mes recettes, et ils vont partager de bons moments en famille.
Depuis toujours, je veux accompagner les gens, les aider. Un livre, c’est un objet que j’adore, car il peut nous accompagner très longtemps. Certaines personnes m’écrivent encore à propos de mon premier livre, publié il y a 15 ans. Je vois leurs photos avec des pages au coin tourné, des taches de sauce, des Post-it partout…
2. Qu’est-ce qui vous a guidées, ton équipe et toi, dans le choix des recettes réconfortantes?
On a la chance d’avoir une super communauté, on a fait un gros sondage sur les réseaux sociaux. Les gens nous répondent avec une grande générosité. Le réconfort est une notion assez personnelle, et je ne voulais pas que ce soit seulement le mien dont il soit question. Pour certaines personnes, le réconfort est lié aux souvenirs d’enfance, mais pour d’autres, ce sont plutôt des souvenirs de voyage, des moments heureux ou de fête.
C’est ce qui m’a guidée dans la conception du livre, ce large répertoire de plats réconfortants. Peu importe ce que les gens me répondaient, j’ai réalisé qu’il y avait des points communs aux différentes recettes. Les repas sont mous, chauds, crémeux, moelleux.
3. Dans l’introduction du livre, tu utilises un terme tout doux pour faire référence au réconfort : baume
. As-tu reçu des témoignages quant à un besoin d’alléger le quotidien ou d’atténuer une fatigue générale, tout particulièrement après des années de pandémie?
Les gens m’ont beaucoup parlé du stress ambiant lié à la pandémie, du fait que la situation n’est pas tout à fait terminée. Il y a l’actualité qui entre en compte, aussi : l’environnement, la situation mondiale (la conception du livre s’est déroulée au début du conflit en Ukraine…). L’inflation les inquiète, tout comme l’augmentation du prix des aliments et de l’incidence sur leur famille, leur budget et leur quotidien. J’ai senti un peu qu’on était tous dans le même bateau et qu’on avait tous besoin de se retrouver dans un petit cocon; que tout s’arrête le temps d’une soupe, d’un plat de boulettes ou d’une casserole.
4. Une des propositions les plus ludiques du livre est de simplifier la préparation laborieuse de certains plats réconfortants. Y en a-t-il un qui a été particulièrement difficile à remanier?
La soupe façon cigare au chou. Les cigares au chou, c’est tout un projet! On n’a pas le temps de cuisiner ça dans notre tourbillon avec les enfants, la famille et le travail, mais c’est tellement bon et ça fait tellement de bien, ce plat. Quand on a eu l’idée de le transformer en soupe, avec les mêmes saveurs que le plat original, mais sans l'assemblage et le bricolage, ça m’a vraiment rendue fière.
Et c’est la recette qui a été le point de départ de l’ensemble du chapitre des soupes, qui sont toutes des réinterprétations de grands classiques en cuisine. C’est un deux pour un, côté réconfort. Même chose pour la soupe façon pâté au poulet : on n’a pas besoin de se lancer dans la confection d’une pâte, avec une longue cuisson et tout, mais ça goûte comme le vrai pâté au poulet crémeux et rassurant.
Macaroni à la viande
5. Y a-t-il un type de préparation culinaire ou une tâche en cuisine qui augmente ton niveau de stress, que ce soit pour de la création de contenu ou à la maison?
Très facile de répondre ici : laver la vaisselle… Mon équipe le sait (rires). Je m’en passerais volontiers, mais c’est un incontournable en cuisine. Pour les recettes du livre, on a fait un effort supplémentaire pour diminuer la quantité de vaisselle sale. Parfois, le plat peut être simple à cuisiner, mais on doit se battre avec la casserole pour la laver après. Si la cuisine se transforme en champ de bataille avec plein de petits pots, ça ne marche pas.
On a donc révisé nos étapes et nos méthodes de préparation afin de réutiliser les ustensiles et les bols. Je ne voulais pas que la mention sans effort
soit sur la page couverture sans qu’elle s’incarne dans le livre. Chaque recette possède sa dose de sans effort
. Ça passe par la méthode, la vaisselle et la liste d’ingrédients, tous peu nombreux et faciles à trouver.
6. C'est super qu'on nous offre la possibilité de cuisiner une recette sans même salir un couteau, comme pour la sauce chunky végé. Quel outil demeure toutefois essentiel pour la cuisine doudou?
La mijoteuse. Ça s’est peut-être un peu essoufflé; les gens ont eu des déceptions liées à la mijoteuse, avec des plats fades, mais je l’ai utilisée ici de façon exigeante. Je voulais que ce soit savoureux et appétissant à tout coup. C’est un outil qui nous simplifie la vie en cuisine : on a juste à mettre les ingrédients et à peser sur le piton! Même chose en pâtisserie. La brioche à la mijoteuse est tellement bonne et moelleuse; ça nous a pris énormément de tests pour arriver à un tel résultat.
Il y a aussi un bœuf effiloché à la mijoteuse à quatre ingrédients qui est très, très simple à cuisiner. Pendant les tests en cuisine, on a essayé des versions avec une viande saisie au préalable et d’autres sans l’avoir fait. Ça ne faisait rien comme différence à l’aveugle, alors on a coupé cette étape, et chaque fois, on remplaçait un ingrédient par un autre qui en remplaçait trois ou quatre autres. On était vraiment en mode épuration.
7. Tu présentes certains ingrédients fétiches pour nous dépanner : le fromage mozzarella, les saucisses italiennes et les pommes de terre jaunes. Ajouterais-tu certains ingrédients du garde-manger à cette liste?
Sans hésiter, les tomates. La fameuse boîte de tomates est si pratique. Et la farine! C’est un ingrédient de base pour rendre les sauces plus onctueuses ou pour préparer une béchamel facile. On pense qu’elle a un rôle de soutien en cuisine, mais on en a besoin au quotidien. J’aime ce genre d’ingrédient polyvalent et caméléon, qu’on ne voit pas et qu’on ne goûte pas, mais qui a besoin d’être là pour un super brownie ou un bon gratin.
Biscuits triple chocolat
8. La cuisine réconfort est habituellement associée à la saison froide. Les photos du livre illustrent bien l’ambiance chaleureuse que l’automne et l’hiver inspirent. Pourrais-tu nous décrire le processus créatif derrière cet aspect?
C’est un exercice effectué avec ma directrice artistique, Catherine Gravel. On voulait créer un effet apaisant dans l’ensemble du livre, pour qu’il nous fasse du bien rien qu’en le feuilletant. On voulait que les photos aient l’effet d’un baume, d’une doudou. On a travaillé un univers différent de celui des livres précédents, pour créer une ambiance chaleureuse, dans les matières, les textiles, avec le bois du chalet. Toute notre équipe artistique a travaillé pour réunir des objets importants. On voit mon cahier recettes familial, avec l’écriture de ma mère et de mon père. Pour la recette de la page 60, on s’est servi du poêlon de fonte de ma mère, celui qu’elle a acheté l’année de ma naissance.
En février dernier, toute l’équipe s’est rendue au chalet d’amis… en pleine tempête de neige ! On a passé deux jours à se faire de bonnes bouffes, à cuisiner et à photographier les recettes du livre telles quelles, sans l’attention excessive qu’on peut leur donner en studio. Et ce sont les plats qu’on a mangés. La tablée italienne qu’on voit dans le chapitre sur les pâtes, c’était notre souper. On a capté des moments de la vraie vie; c’était plus brut, authentique et détendu.
9. Quel est ton plat réconfort chouchou dans le livre?
Le carré aux dattes. Ma mère m’en fait encore et elle sait qu’elle doit doubler sa recette! Pour Frédérique, notre cuisinière en développement, c’étaient les galettes à l’avoine, qui lui rappelaient celles de la cafétéria à l’école. Comme je le disais plus tôt, pour certaines personnes, le réconfort passe par les souvenirs de voyage plutôt que ceux de l’enfance, d’où les recettes plus exotiques qu’on trouve : le bœuf à la vietnamienne, le pan con tomate espagnol, la soupe tonkinoise...
D’autres personnes nous ont parlé de leur transition récente vers le végétarisme. Elles ont rayé de leur menu les plats de viande mijotée de leur enfance; elles nous ont souligné qu’elles s’ennuyaient des boulettes, des ragoûts. C’est pourquoi on a trois types de boulettes – avec viande, végés et quasi végés –, pour que chacun puisse y aller à son rythme.
Pour avoir une meilleure idée du genre de propositions que vous trouverez dans son livre, consultez ce menu pour cuisiner des plats réconfortants!
10. Ceux et celles qui te suivent connaissent ton amour du voyage. Lorsque tu es aux prises avec le décalage horaire à l’étranger, as-tu un rituel gourmand pour te remettre sur pied?
Avec le décalage, je vise la pâtisserie ou la boulangerie près de l’hôtel pour une boisson et un petit truc sucré : un biscuit, une brioche ou n’importe quelle viennoiserie. On parle beaucoup de plats réconfortants comme étant des plats chauds, mais en voyage, je me rends dans un marché public pour voir les aliments frais. Je vais aussi y déguster une spécialité locale ou un peu de street food [cuisine de rue]. Ça me fait un grand bien.
11. Des boulettes, des sauces maison, des soupes savoureuses : tu nous proposes, dans Réconfort sans effort, de bons petits plats qu’il ferait bon retrouver à l’épicerie, un mardi soir. Le prêt-à-manger, est-ce dans tes plans?
Il ne faut jamais dire jamais, mais pas pour l’instant. J’ai encore beaucoup d’idées et de motivation pour aider les gens à cuisiner simplement, avec des produits de base. Je suis heureuse dans ce modèle-là.
