La restauration québécoise est à l’aube d’une révolution, mais ses acteurs ont besoin de travailler de concert. C’est du moins l’idée derrière un nouveau collectif de la gastronomie, La Table ronde, dont la création a été annoncée aujourd’hui. Cette organisation regroupe de grands noms de la haute cuisine, dont Colombe St-Pierre, Martin Picard et Normand Laprise. Sa mission : donner un coup de main à une industrie qui jusqu’à maintenant manquait d’unisson.
Ça n’a plus d’allure de se battre pour avoir du thon ou un petit peu d’oursin du Québec, lance Félix-Antoine Joli-Coeur, consultant en management, qui dirige l'initiative. On va identifier les produits de niche les plus porteurs, ceux qui sont compliqués, mais qui ajoutent une plus-value.
Ces aliments, comme les oursins, les huîtres, le thon et d’autres produits québécois de la mer et de la terre, sont très souvent exportés à fort prix, et ce, avant d’arriver entre les mains des restauratrices et restaurateurs locaux. Certaines tables se regroupaient déjà informellement pour acheter des produits de niche, mais La Table ronde souhaite désormais encadrer l’achat et la distribution d'aliments par le truchement d’un fonds.
« Présentement, c’est plus compliqué de servir 80 restaurants que de mettre toute ta production sur un avion qui s’en va au Japon. »
La première enveloppe vient du ministère de l’Économie et contient 990 000 $, de l’argent qui servira à démarrer l'initiative et à en assurer le bon déroulement pour les trois premières années. Par la suite, du financement privé régulier s’ajoutera au fonds, explique M. Joli-Cœur. Les avocats, les banquiers et le gouvernement vont dans les grands restaurants avec leurs clients. C’est le temps qu’ils se mettent derrière et qu’ils soutiennent cette industrie
, lance-t-il.
La Table ronde fait miroiter l’idée d’un système de distribution sur les deux rives du fleuve, qui permettrait par exemple de monter avec du crabe et de redescendre avec les premières asperges de la saison, provenant du sud de la province. On va avoir jusqu’à 140 chefs. Eux, ils vont nous diriger. On a rassemblé les Carey Price de la restauration. On sait maintenant ce qu’on doit viser
, illustre M. Joli-Cœur.
Mais l’accès aux produits à forte valeur ajoutée n’est qu’un début pour la nouvelle organisation, qui regroupe pour l’instant 35 chefs. Le partage des connaissances et des ressources fera également partie de la mission de La Table ronde. Par exemple, des conseils pour trouver une assurance collective ou pour s'entendre sur un bon modèle de répartition des pourboires seront partagés par l'ensemble des membres, des défis auxquels font face bien des gestionnaires.
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L’éléphant dans la pièce, c’est l’absence chronique de personnel qualifié pour travailler en restauration. À cela, le nouveau groupe d’intérêt s’attaquera plus tard, car les priorités ciblées par le ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon, se concentrent davantage sur l’achat local et le maillage entre les entreprises.
« Rien à voir » avec la pandémie
Si la désorganisation du milieu de la gastronomie a été mise en lumière par les affres de la pandémie, la création de La Table ronde n’a rien à voir
avec les mesures sanitaires, affirme Félix-Antoine Joli-Cœur. C’était simplement un moment de vérité
, ajoute-t-il.
Il s’agit plutôt de faire valoir l’importance de la gastronomie à l’échelle du quartier, de la ville, de la province et du pays, non seulement en termes économiques, mais aussi sur le plan du rayonnement de la culture.
Son codirigeant ne s’en cache pas, le modèle de La Table ronde est calqué sur celui de Propulsion Québec, la grappe qui a fondé la filière du transport électrique dans la province. Ce qu’on a ici en restauration, c’est aussi fort que la batterie au lithium
, affirme-t-il.
Voici les premiers et premières membres de la Table ronde :
- Julien Masia, ARVI
- Mélanie Blanchette, Bouillon Bilk / Place Carmin / Cadet
- Martin Picard, Cabane Au Pied de Cochon / Au Pied de Cochon / Cabane d’à Côté
- Mireille Perron et Jean-Sébastien Sicard, Chez Mathilde
- Colombe St-Pierre, Chez Saint-Pierre
- Olivier de Montigny, La Chronique
- Stéphane Modat, Le Clan
- Hubert Marsolais, Le Club Chasse et Pêche / Le Filet / Le Serpent
- Perle Morency, Côté Est
- Ivan Abbas, Damas / Folfol
- Émile Tremblay, Faux Bergers / La Louve, buvette gentille
- Claudia Ferreira, Groupe Ferreira
- Dyan Solomon, Foxy / Olive & Gourmando / Un Po’ Di Piu
- Graziella Batista, Graziella / Espace 116 / Mercato Communale
- Jason Stafford, Le Hatley
- Helena Loureiro, Helena / Portus 360, Helena Québec
- Marc-André Jetté, Hoogan et Beaufort / Édouard et Léo / Marc-André le Traiteur
- Frédéric Morin, Joe Beef / Liverpool House / Vin Papillon / McKiernan
- Junichi Ikematsu, Jun I
- Sophie Allaire, La Belle Histoire
- Daniel Vézina, Laurie Raphaël
- Fanny Ducharme, L'Épicurieux
- Mario Brossoit, L’Express
- Richard Bastien, Le Mitoyen
- Jérémie Bastien, Monarque
- Charles-Antoine Crête, Montréal Plaza / Foodchain
- Antonin Mousseau-Rivard, Mousso
- Ryan Gray, Nora Gray / Elena / Gia Vin & Grill
- Véronique Rivest, SOIF
- Jean-Luc Boulay, Le Saint-Amour
- Stephen Leslie, Tavern Monkland / Tavern on the Square
- Normand Laprise, Toqué! / Beau Mont / Brasserie T
- Dominique Truchon, Truchon
- Vanya Filipovic, Vin Mon Lapin