Cannelle, clou de girofle, muscade, gingembre… Comment ces épices du bout du monde se sont-elles introduites dans nos plats traditionnels des Fêtes? Avec l’historienne Evelyne Ferron, L’épicerie retrace l’histoire métissée de ces épices qui font partie du commerce mondial depuis des milliers d’années!
De la Rome antique au Moyen-Âge
Les épices ont toujours fait office de monnaie d’échange. Dans la Rome antique, les Romains commerçaient par le biais de l’ancienne route de la soie, comme l’explique Evelyne Ferron. Ils avaient découvert le clou de girofle, la cannelle, la muscade, et ils utilisaient ces épices pour donner de la saveur à leurs plats, particulièrement aux poissons.
Grâce au commerce des épices, les Romains utilisaient également la cannelle et le clou de girofle pour masquer le piètre goût de leurs vins de table. Cette tradition de vin chaud aux épices a par la suite été conservée par les pays germaniques, et s’est rendue jusqu’à nos marchés de Noël.
Au Moyen-Âge, les épices arrivaient du Moyen-Orient par les grandes voies commerciales médiévales. Les croisés [les soldats qui partaient en croisades] ont découvert les tables enrichies par les épices provenant d’un peu partout. C’est là que sont arrivés les desserts avec beaucoup de cannelle
, raconte l’historienne.
Les épices sont devenues populaires dans les pays plus au Nord, particulièrement durant la saison hivernale. Pendant l'hiver, on mangeait ce qui avait été récolté, mais plus on avançait, plus la saveur des aliments commençait à diminuer. Pour dissimuler leur goût fade ou presque pas consommable, on utilisait les épices
, raconte Evelyne Ferron.
Un produit réservé à l’élite
Au Moyen-Âge, seulement les gens fortunés avaient accès aux épices, car elles étaient rares et très chères. Ceux qui ont les moyens d'acheter des épices par le commerce des épices, ce sont des rois ou des membres de la noblesse qui veulent étaler leur richesse.
Et c’est particulièrement lors des fêtes religieuses, par exemple à Pâques et à Noël, que ces nobles affichaient leurs richesses dans des plats agrémentés de précieuses épices.
Du pain d’épices… de Chine
Les plus anciennes traces du pain d’épices remontent au deuxième, voire au troisième millénaire avant notre ère, en Chine. On faisait déjà cette espèce de gâteau très épicé parce que ça se conservait mieux et plus longtemps aussi
, résume l’historienne.
Cette coutume orientale a voyagé jusqu’en Europe, où l’on a façonné des pains d’épices en forme de bonshommes et de maisons.
Mais le doute plane toujours sur l’origine des maisons de pain d'épices. « Est-ce que la maison de pain d'épices allemande a influencé le conte Hansel et Gretel des frères Grimm? Ou est-ce que les frères Grimm, avec leur interprétation d’Hansel et Gretel, ont popularisé la maison en pain d'épice en Allemagne? Mystère! » conclut Evelyne Ferron.
La démocratisation des épices
Les épices ont commencé à être plus accessibles avec l’Empire britannique, au moment où elles sont entrées massivement dans les colonies britanniques. C’est ainsi que les épices ont fait leur entrée chez nous, en Amérique du Nord!
L’héritage culinaire du Québec est une histoire de métissage. La cuisine québécoise a été influencée au fil des années par la France, la Grande-Bretagne et les États-Unis, bien sûr, mais aussi par les différentes vagues d’immigration allemande, néerlandaise et écossaise.
Après avoir fait le tour du monde, les épices comme le clou de girofle, la muscade, la cannelle et le gingembre ont fait leur entrée dans nos traditions des Fêtes, indissociables de nos pâtés à la viande, tourtières, cretons et biscuits!