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Nouvelle olympique

Les Jeux olympiques des exclus

Au moins 215 athlètes canadiens ont été à Pékin, alors que d'autres sont restés au pays.

Derek Livingston dans les airs lors d'une épreuve de demi-lune aux Jeux d'hiver de Pyeongchang en 2018.

Derek Livingston a dû céder sa place à Pékin en raison d'une blessure.

Photo : La Presse canadienne / Jonathan Hayward

Pendant les trois dernières semaines, le Canada a brillé aux Jeux olympiques de Pékin. Pas moins de 215 athlètes ont fièrement représenté le pays, mais beaucoup d'autres n'ont pas eu cette chance parce qu'ils ont contracté la COVID au mauvais moment, se sont blessés ou parce qu'ils ont simplement raté leur qualification.

Derek Livingston fait partie des malchanceux, pourrait-on dire. Le planchiste d'Aurora, en Ontario, avait son billet en poche pour Pékin. Il était le seul Canadien à s'être qualifié pour la demi-lune. Mais un peu plus d'une semaine avant les Jeux, il est mal tombé à l'entraînement et s'est fracturé le péroné.

C'était un accident bizarre, un peu étrange. J'avais tenté ce saut (sur un coussin gonflable) une tonne de fois sans jamais me faire mal. Alors que ça arrive comme ça, ç'a été dévastateur, raconte-t-il lors d'une entrevue par visioconférence avec Radio-Canada.

J'entamais la semaine avec enthousiasme en pensant à Pékin, en pensant à mes troisièmes Jeux. Puis, à l'instant où j'ai touché le coussin, j'ai su que c'était terminé. Ça m'a démoli, poursuit-il.

« Les Jeux olympiques sont le point culminant tous les quatre ans. Le monde entier les regarde. »

— Une citation de  Derek Livingston, planchiste

Livingston avait déjà pris part à ceux de Sotchi en 2014 et de Pyeongchang en 2018. Son deuil n'a pas été moins difficile, étant donné les sacrifices qu'il a dû faire ces quatre dernières années afin d'aller en Chine.

Il a fallu faire des quarantaines au retour de nos voyages à l'international. Je n'ai pas pu voir ma femme, mon chien, ma famille et mes amis. Il a fallu s'isoler et ç'a été très dur, dit-il.

Il patine lors d'une compétition à Tokyo en novembre.

Le patineur Nam Nguyen est l'un des plus beaux talents de sa génération au Canada.

Photo : Associated Press / Shuji Kajiyama

Les rigueurs du cycle olympique sont méconnues du grand public, croit le patineur Nam Nguyen. Ce dernier n'a pas atteint son objectif de représenter le Canada à Pékin. Il s'est classé seulement 6e parmi les hommes aux plus récents Championnats nationaux. Dans son cas, la pandémie est venue contrecarrer ses plans.

Ça a été un énorme coup pour moi. J'ai eu du mal à le supporter mentalement et physiquement, avoue-t-il. J'ai essayé de continuer à avancer malgré toutes les annulations. Je patinais bien au début, mais j'ai vite commencé à ressentir l'épuisement mental. Et il m'a été très difficile de rebondir cette année.

Comble de l'ironie, Nguyen, qui était perçu comme l'un des patineurs favoris pour représenter le pays à Pékin, a contracté la COVID-19 une semaine avant les Championnats nationaux. À partir de là, j'ai compris que ce serait pratiquement impossible pour moi de faire ma place au sein de l'équipe canadienne, dit-il.

En dépit de sa déception personnelle, Nguyen, comme Livingston, a appuyé inconditionnellement ses compatriotes tout au long des Jeux. C'est d'abord parce qu'il y a une camaraderie dans les différentes équipes nationales, puis aussi parce qu'il y a une compréhension commune des défis que les athlètes doivent affronter. Les échecs des uns ne devraient pas les empêcher de féliciter les autres pour leurs succès, croit-il.

Natalie Eilers effectue un saut à ski lors d'une compétition, à Oberstdorf, en Allemagne.

Natalie Eilers n'a pas réussi à se qualifier pour les Jeux olympiques.

Photo : Associated Press / Matthias Schrader

Natalie Eilers, de l'équipe canadienne de saut à ski, évoque le même sentiment. Elle n'était pas à Pékin, n'ayant pas réussi à se qualifier pour ces Jeux d'hiver, mais elle est très fière de ses coéquipiers, d'autant plus qu'ils ont remporté la première médaille de l'histoire du Canada dans ce sport.

Dans notre cas, on a presque tous grandi ensemble. Alors, les victoires (de mes coéquipiers) sont aussi les miennes. J'étais aussi heureuse que je l'aurais été pour moi-même, confie-t-elle.

Cette dernière se décrit comme une grande admiratrice des Olympiques. Ç'a toujours été mon rêve depuis que je suis toute petite, précise-t-elle. Malgré la déception de ne pas en être cette année, elle n'avait pas l'intention de les rater.

Deux hommes mordent dans une médaille d'or.

Alexander Kopacz (à droite) sur la première marche du podium des Jeux olympiques de Pyeongchang en bob à deux avec son coéquipier Justin Kripps.

Photo : Associated Press / Charlie Riedel

L'Ontarien Alex Kopacz, lui, n'envisageait pas d'être à Pékin. Champion de l'épreuve masculine du bob à deux avec Justin Kripps à Pyeongchang en 2018, il a dû prendre sa retraite en raison, entre autres, de blessures.

Malheureusement, en raison de l'état du bas de mon dos, je ne crois pas que je ferai du bobsleigh à nouveau. J'ai encore quelques opérations à subir. Au total, j'en ai déjà eu quatre pour essayer de soulager ma douleur chronique. Et puis, il y a mes genoux. Et ça, c'est une autre histoire. Alors peut-être que si j'avais de nouvelles pièces, j'aurais aimé dépoussiérer mes crampons et voir ce qu'il me restait en réserve.

L'athlète en lui n'a cependant pas souffert de voir ses anciens coéquipiers de l'équipe nationale de bobsleigh en action. La raison étant qu'il s'est reconverti en entraîneur pour deux d'entre eux.

Si je n'avais pas eu des athlètes dans la compétition, j'imagine que ma réaction aurait été différente. Mais comme c'est le cas, ça m'a un peu distrait du fait de ne pas être présent, dit-il.

De son expérience de téléspectateur, Kopacz garde tout de même une leçon importante.

Aux Jeux olympiques, on ne voit que la fin. On ne voit pas à quel point les athlètes ont souffert ou souffrent encore. Je pense au ski de fond et au patinage de vitesse. On ne peut pas comprendre, à la vue, la sensation de brûlure qui vient avec l'acide lactique à moins de l'avoir vécue en se poussant à la limite. Je me suis rendu compte qu'il y a des sacrifices qu'on ne peut pas comprendre vite comme ça, conclut-il.

Et c'est aussi vrai pour les athlètes sur lesquels les projecteurs n'ont pas été braqués pendant les Olympiques.