Des drones livreront des médicaments de Joliette à Manawan

Le déploiement d’un couloir aérien répondra à un besoin criant dans la communauté de Manawan pour un accès plus rapide aux soins de santé et aux médicaments, soutient le vice-chef Paul-Émile Ottawa.
Photo : Getty Images / Onfokus
Développer un corridor aérien qui permettra aux drones – et éventuellement aux taxis aériens – de transporter des produits de soins médicaux de la ville de Joliette à la communauté atikamekw de Manawan, c’est le pari ambitieux que s’est donné Vertiko Mobilité il y a près d’un an.
L’entreprise québécoise en a fait l’annonce vendredi passé lors d’une conférence de presse à Mirabel, où elle a présenté ses partenaires. Parmi ceux-ci, on retrouve des entreprises spécialisées en aviation, mais également le CISSS de Lanaudière et le Conseil des Atikamekw de Manawan.
Pour le vice-chef Paul-Émile Ottawa, les membres du Conseil n'ont pas hésité à embarquer dans le projet
, puisqu'il répond à des besoins très importants pour la communauté
.

Le vice-chef du Conseil des Atikamekw de Manawan, Paul-Émile Ottawa. (Photo d'archives)
Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers
Nous avons connu dans un passé récent des événements malheureux causés par le fait que les membres de notre communauté doivent se déplacer sur de grandes distances pour recevoir des soins de santé adéquats, ou par le fait que certains médicaments ou traitements d’urgence ne sont pas accessibles à Manawan
, explique M. Ottawa en entrevue, mentionnant au passage le décès de Joyce Echaquan à l’hôpital de Joliette en 2020.
Le vice-chef considère même ce partenariat avec le CISSS de Lanaudière et les différentes municipalités de la région comme une main tendue
.
Pour sa part, le chef de la communauté, Sipi Flamand, affirme que le développement technologique n'est pas incompatible
avec les traditions des peuples des Premières Nations.

Le chef du conseil des Atikamekw de Manawan, Sipi Flamand. (Photo d'archives)
Photo : Radio-Canada / Marie-Laure Josselin
Il faut simplement réfléchir ces développements en harmonie et non au détriment des traditions. La meilleure façon de le faire, c’est d’impliquer les personnes concernées et celles détenant le savoir dans le processus, plutôt que de présupposer leurs réactions
, poursuit-il dans un communiqué.
Des livraisons dès 2026
Présentement, il faut près de trois heures en voiture pour se rendre de Joliette à Manawan, mais en drone, il suffira d'une heure, soutient Yannick Richard, le vice-président directeur de Vertiko Mobilité.
De plus, la route empruntée a été mise en cause dans plusieurs tragédies
, notamment le périlleux
tronçon de gravier de 86 km qui relie Manawan à Saint-Michel-Des-Saints, ajoute-t-il.
L'idée lui est venue d'un groupe de médecine familiale implanté à Saint-Donat, qui offre des services de télémédecine à la communauté de Manawan, qui s'est rendu compte que le délai pour le transport des médicaments était long
, relate M. Richard.
Pour mener à terme ce projet, les partenaires et Transport Canada devront déterminer le tracé du corridor aérien, qui passera aussi par les municipalités de Saint-Donat et Saint-Michel-Des-Saints.

Yannick Richard, vice-président directeur Vertiko Mobilité.
Photo : Myriam Boulianne
Pour ce faire, M. Richard assure que la population sera consultée. L'acceptabilité sociale est au cœur du projet
, dit-il, en ajoutant qu'ils veilleront à éviter les routes où il y a des résidences
.
Selon ce dernier, les drones – qui seront pilotés à partir d'un centre de commande – survoleront le territoire à une hauteur établie entre 200 et 300 pieds, et ils pourront atteindre une vitesse de 150 km/h.
La période d’essai devrait commencer au printemps 2024 et s’étaler jusqu’en 2025. Les livraisons devraient débuter durant l'année 2026, si tous les axes sont alignés avec les partenaires et les communautés
, fait savoir M. Richard.
Outre le transport de médicaments, Vertiko Mobilité et ses partenaires prévoient également transporter des patients à bord de taxis aériens en passant par le corridor.
Mais ce sera très très long
, avertit le vice-président directeur. On commence avec les drones, et après, on monte en puissance
, explique celui qui planifie la concrétisation de cette deuxième étape pour 2028 ou 2029.
Moins dépendre du réseau routier
Pour le CISSS de Lanaudière, il s'agit d'un projet assez atypique
, reconnaît son président-directeur général adjoint, Philippe Éthier, qui l’accueille toutefois très favorablement
.

Philippe Éthier, président-directeur général CISSS de Lanaudière.
Photo : Myriam Boulianne
Pour nous, il y a un gain potentiel au niveau de la livraison de médicaments et des produits de soins. Les délais et la fréquence seront réduits.
La région couvre un territoire d'une superficie de 12 500 km2 et près de 550 000 personnes y reçoivent des services et des soins, rappelle-t-il.
Ce projet leur permettra ainsi de moins dépendre du réseau routier
, en plus de pouvoir livrer les produits plus efficacement
, ce qui aura un impact sur la qualité des soins
, poursuit le président-directeur général adjoint.