•  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  

Feux de forêt : Pessamit accueille « ses frères et sœurs » de Mani-utenam

Les Innus de Mani-utenam qui ont dû fuir les feux de forêt ont trouvé refuge chez « leurs frères et sœurs » de Pessamit, 300 kilomètres plus à l’ouest. Une situation inédite, qui montre la grande solidarité qui existe entre ces deux communautés et une capacité d’organisation efficace.

Des lits de camp.

L'aréna peut accueillir 300 lits de camp.

Photo : Radio-Canada / Delphine Jung

La petite Jasmine devait fêter son anniversaire avec ses amis, entourée de cadeaux. Mais la nature en a décidé autrement.

Les feux de forêt qui font rage à quelques kilomètres à peine de la communauté innue de Mani-utenam (la communauté de Uashat mak Mani-utenam étant divisée en deux, de part et d’autre de Sept-Îles, seul le côté le plus à l’est, Mani-utenam, a dû être évacué, NDLR) ont forcé le conseil de bande à ordonner l’évacuation de quelque 300 personnes.

Jasmine a donc fêté ses 10 ans dans la salle communautaire de Pessamit, qui a ouvert ses portes à ses frères et sœurs de la Côte-Nord.

Macgali Fontaine.

Macgali Fontaine est venue avec ses enfants, dont l'une a dû fêter son anniversaire loin de sa communauté.

Photo : Radio-Canada / Delphine Jung

Dans la grande salle, des ballons bonne fête volent encore en fin d’après-midi. Un gâteau a été partagé, mais les cadeaux sont restés à Mani-utenam. Le plus important, c’est qu’elle souffle ses bougies le jour de sa fête, dit sa mère, Macgali Fontaine.

Les communautés autochtones face aux feux de forêt

Consulter le dossier complet

Feu de forêt avec fumée et flammes, près d'une rivière, le 15 mai 2023, à Hay River, aux Territoires du Nord-Ouest.

Comme des centaines d’autres, elle a dû faire ses valises et fuir. Certains sont arrivés en bus vendredi soir, d’autres ont pris leur propre véhicule. Beaucoup ont trouvé refuge chez des amis ou de la famille. Une trentaine d'autres dorment sur des lits de camp installés dans l’aréna de Pessamit.

Un tableau blanc sur lequel est indiqué le menu du soir.

L'organisation a été très vite mise en place pour l'accueil des évacués.

Photo : Radio-Canada / Delphine Jung

L’organisation est bien rodée. En un temps record, le conseil de bande a pu prévoir cet accueil massif. Des bracelets leur ont été donnés pour les identifier, des douches sont à leur disposition, ainsi qu’une buanderie.

On fait aussi des commandes de nourriture, on fait des courses à Baie-Comeau, et tout est cuisiné sur place, ajoute Christian Rock, agent de communication.

Une trentaine de bénévoles prêtent aussi main-forte pour le service et l’organisation d’activités. Dimanche après-midi, c’était bingo. Les jeunes ont pu faire une sortie en canot, louer du matériel de sport.

On a déjà organisé un grand rassemblement des aînés et on a accueilli les Jeux autochtones… Donc ce n’est pas la première fois qu’on a autant de monde chez nous, poursuit M. Rock.

Une femme dans la forêt.

La cheffe Marielle Vachon souligne l'élan de solidarité entre les Innus.

Photo : Radio-Canada / Delphine Jung

Le conseil de bande le sentait venir. Marielle Vachon, la cheffe, raconte que quelques jours avant, toute son équipe était déjà sur le qui-vive, prête à héberger les gens de Mani-utenam.

J’avais anticipé leur venue, tout s’organise très bien. Ça se déroule très bien. C’est sûr que ce sont des lits de fortune, mais dans les circonstances, on n’a pas le choix et on le fait avec un grand cœur.

Une citation de Marielle Vachon, la cheffe du conseil de bande de Pessamit

Pessamit a été choisie comme destination pour les évacués pour plusieurs raisons, d’ailleurs. En plus de liens évidents entre les familles des deux communautés, Pessamit dispose de plusieurs infrastructures qui rendent l’accueil possible, ce qui est moins le cas d’une autre communauté innue plus proche de Uashat mak Mani-utenam, Ekuanitshit.

Un feu de forêt.

Le feu de forêt touche durement la Côte-Nord en ce début du mois de juin.

Photo : André Michel

En plus, rappelons que le pont Touzel, à hauteur de Sheldrake, est actuellement coupé. La Minganie est isolée en ce moment. On voulait aussi que les gens aillent plus vers l’ouest pour être proches des grands centres comme Québec, indique Djavan Habel-Thurton, directeur des communications au conseil de bande de Uashat.

Loin de Mani-utenam, les Innus commencent à prendre place pour profiter d’un repas chaud. Ce soir, c’est fettucine au poulet.

Dans les cuisines, une invitée que tout le monde remarque s’active à couper du poulet en lanières. Michèle Audette, la sénatrice originaire de Uashat mak Mani-utenam, est venue apporter son soutien. Charlotte sur la tête, elle explique la solidarité qui existe entre les deux communautés.

Michèle Audette dans une cuisine en train de couper du poulet en lanières.

Michèle Audette est venue donner son aide aux évacués de Pessamit.

Photo : Radio-Canada / Delphine Jung

Il faut dire que sa mère, Evelyne St-Onge, fait partie des habitants de Mani-utenam. Comme quelques aînés, elle a eu une place au centre de santé. J’étais incapable de rester sur place, de rester impuissante, alors je suis venue de Québec. Je devais trouver ma mère, raconte-t-elle.

Dans la cuisine, la bonne humeur règne. Pourtant, dans les esprits, tous ont la tête à Mani-utenam. Quand on te retire de chez toi, tu te sens un peu ébranlé, tu vois toute ta famille déracinée, c’est assez déstabilisant psychologiquement, j’étais à fleur de peau, explique Virginie Michel.

Personne ne sait dans quel état ils vont retrouver leur maison. Ça reste matériel, même si ce sont des souvenirs. Mais le plus important, c’est notre sécurité, que nos enfants soient en sécurité, dit de son côté Simon Pilot.

Simon Pilot joue de la guitare assis sur son lit de camp.

Simon Pilot n'a pas oublié de prendre sa guitare dans ses affaires lorsqu'il a quitté Maliotenam.

Photo : Radio-Canada / Delphine Jung

Lui est parti sans oublier sa guitare. Il va dormir dans l’aréna ce soir. Comme Tangerine Malleck et Philippe Rock. Le couple s’installe dans ce qui sera sa chambre pour un temps encore indéterminé.

Ils ont collé leurs lits de camp et s’affairent à créer un endroit le plus douillet possible. C’est vraiment confortable, finalement. Je suis surpris par la qualité du matelas, lance en riant Philippe. On a de la bouffe, de l’eau, des serviettes…, ajoute-t-il.

Un homme et une femme qui font un lit.

Tangerine Malleck et Philippe Rock s'installent dans ce qui sera leur chambre ce dimanche soir.

Photo : Radio-Canada / Delphine Jung

En montrant son bracelet bleu d’identification, Tangerine ajoute : je me sens comme au manège !

Ils ne manqueront pas de nourriture, rassure la cheffe Vachon en montrant un énorme camion réfrigéré qui a été réquisitionné pour stocker des denrées périssables.

Les Innus ont cette capacité incroyable de garder le sourire, de trouver le positif dans toutes les situations, et de faire preuve d’une résilience impressionnante.

L’élan de solidarité a aussi réchauffé le cœur de beaucoup d’Innus de Mani-utenam. Comme Virginie Michel, venue avec son conjoint, originaire de Pessamit, Pipan Fontaine.

Une petite fille mange un gâteau.

Beaucoup d'enfants sont parmi les évacués de Uashat mak Mani-utenam.

Photo : Radio-Canada / Delphine Jung

C’est dans ces moments-là qu’on voit la force des Autochtones. La solidarité. On s’est sentis très bien accueillis dès qu’on est arrivés.

Une citation de Virginie Michel, évacuée

Beaucoup de Pessamiulnuat se sentent aussi honorés de pouvoir rendre la pareille à leurs frères et sœurs qui, il y a un peu plus de 30 ans, les avaient alors accueillis lorsque des feux de forêt faisaient rage dans le secteur de Pessamit.

Il y a beaucoup d’entraide entre les Autochtones. Les communautés avoisinantes d’Essipit et Mashteuiatsh nous ont offert leur aide aussi.

Une citation de Marielle Vachon, cheffe de Pessamit

Personne ne sait quand ils pourront revenir chez eux. Ni l’état dans lequel ils retrouveront la maison. Mais la plupart ont choisi de vivre ce grand moment de réunion – forcée – comme une grande réunion de famille. Et demain, on verra.

Vous souhaitez signaler une erreur?Écrivez-nous (Nouvelle fenêtre)

Vous voulez signaler un événement dont vous êtes témoin?Écrivez-nous en toute confidentialité (Nouvelle fenêtre)

Vous aimeriez en savoir plus sur le travail de journaliste?Consultez nos normes et pratiques journalistiques (Nouvelle fenêtre)

Infolettre Info nationale

Nouvelles, analyses, reportages : deux fois par jour, recevez l’essentiel de l’actualité.

Formulaire pour s’abonner à l’infolettre Info nationale.