Feux de forêt : évacuation de la communauté innue de Mani-utenam
La communauté innue de Pessamit a proposé d'accueillir les personnes évacuées.
Quelque 1500 personnes vivent à Mani-utenam, située à 15 kilomètres à l'est de Sept-Îles.
Photo : Radio-Canada
Le conseil de bande innu Takuaikan Uashat mak Mani-utenam (ITUM) a annoncé l’évacuation d’urgence de la communauté de Mani-utenam à cause des feux de forêt qui font rage dans la région.
Les quelque 1500 habitants de la communauté innue située à 15 kilomètres de Sept-Îles sont évacués dans une autre communauté, Pessamit.
La situation a vite empiré. Le feu de la rivière Moisie a pris beaucoup d'ampleur et prend de l'expansion vers le sud
, a indiqué le chef d'ITUM Mike McKenzie.
Un transport par autobus a été organisé par le conseil de bande. Les maisons et la communauté seront surveillées par l'agence de sécurité privée innue spécialisée en gardiennage, Akua, et les employés d'ITUM.
Nous savons que la situation est difficile et appelons la population à la solidarité et au calme dans ces moments difficiles
, a déclaré le chef Mike McKenzie.
La communauté de Uashat mak Mani-utenam déclare aussi l'état d'urgence.
Photo : Radio-Canada / Charles-Étienne Drouin
L’état d’urgence à Uashat mak Mani-utenam a aussi été déclaré, tout comme à Sept-Îles. Les écoles sont fermées. Notre priorité absolue est la protection de la vie et de la santé des membres
, a souligné le chef.
Pour sa part, le ministère des Services aux Autochtones a précisé que le feu pourrait nuire à d'autres communautés, car il a endommagé une voie ferrée qu'emprunte le train reliant Sept-Îles à Schefferville. La Nation Innu Matimekush-Lac John et la Nation naskapie de Kawawachikamach préparent un plan d’approvisionnement alternatif en collaboration avec Tshiuetin, l’entreprise qui exploite ce train
, a indiqué le ministère dans un communiqué.
Des résidents quittent déjà les lieux
À peine une heure après l'annonce du chef, Jean-Guy Pinette, sa sœur et son beau-frère ont pris la route vers Pessamit.
Jean-Guy Pinette vivait déjà un peu d'anxiété, car il entendait que le feu se rapprochait. Il avait aussi de la misère
à respirer hier soir alors qu'il était à l'intérieur de sa maison à Mani-utenam, toutes portes et fenêtres fermées. Ce matin, il a également senti une odeur désagréable.
Pourtant, cette évacuation obligatoire l'a pris un peu de court, car il ne s'y attendait pas. Mais il estime que c'est une bonne chose de manière préventive
. Son beau-frère acquiesce, assis dans la voiture qui les mène à Pessamit, où ils resteront chez la fille de Jean-Guy Pinette. On va être là au moins cinq jours.
L'emplacement des communautés innues de Uashat et Mani-utenam et de la ville de Sept-Îles.
Photo : Radio-Canada
Jeannette Vollant, 76 ans, était en train de prendre un café dans un restaurant de Sept-Îles quand elle a reçu le message. On nous a demandé de ne pas paniquer, de préparer nos bagages
, raconte-t-elle.
Elle est retournée à Mani-utenam chercher ses papiers les plus importants, [ses] médicaments, des affaires de rechange
, etc. Pour l'instant, elle est allée chez sa fille à Uashat, l'autre communauté innue. On attend des nouvelles, il faut laisser la radio ouverte. On ne sait pas si Uashat va être évacuée.
Hier, ça sentait le feu. Aujourd'hui encore, mais on ne le voit pas
, précise-t-elle.
Joyce Dominique s'était préparée à évacuer, alors qu'elle suivait les nouvelles et observait le ciel tout rouge la nuit dernière. Mais même quand tu es préparée mentalement, émotionnellement, c'est une chose quand ça arrive
, lance-t-elle.
Ça brasse, c'est émotif ce qui arrive, insécurisant. Tu t'en vas, mais tu ne sais pas quand tu vas revenir et dans quel état tu vas revenir.
Cette situation fait plonger dans le passé les Innus de Uashat mak Mani-utenam et de Pessamit.
À l'été 1991, Pessamit avait été évacuée à cause de feux de forêt. Les gens de Mani-utenam, comme Jean-Guy Pinette et Jeannette Vollant, avaient accueilli les habitants de cette communauté.
Cela fait bizarre
, raconte Joyce Dominique, originaire de Pessamit, mais qui vit à Mani-utenam depuis neuf ans. Je fais partie des personnes qui ont vécu ça, Pessamit évacuée.
Elle explique que certains résidents étaient allés à Mani-utenam. Maintenant, c'est au tour de la communauté de Pessamit d'accueillir Mani-utenam.
Joyce Dominique va aller dans la maison de son père. Elle a déjà prévu d'héberger une famille avec enfants au besoin. Ceux qu'on peut faire dormir, on va les faire dormir. Ceux qui ont des tentes ou des roulottes pourront s'installer à l'arrière de chez nous. J'ai beaucoup reçu de la communauté de Uashat mak Mani-utenam, donc je peux redonner.
La solidarité de Pessamit
Les personnes évacuées seront en effet hébergées dans la communauté innue de Pessamit, distante de 300 kilomètres.
La cheffe du Conseil des Innus de Pessamit, Marielle Vachon, assure que sa communauté a déjà commencé les préparatifs pour les accueillir. Une équipe de mesures d'urgence est au travail depuis ce matin.
Je lance un message à ma communauté pour qu’il y ait une grande ouverture pour s’entraider entre nous, pour donner un service aux personnes qu’on va accueillir
, a lancé la cheffe Vachon. Elle invite aussi les habitants de Sept-Îles à venir dans sa communauté.
Le feu situé au nord-est de Sept-Îles s'est déclaré le 29 mai. En l'espace de quatre jours, sa superficie est passée de 6,4 kilomètres carrés à 380 kilomètres carrés.
Avec la collaboration de Camille Lacroix-Villeneuve
