Des rappeurs autochtones mettent du beat dans la vie des jeunes de la rue
Les rappeurs autochtones Quentin Condo et Christian Nabinacaboo ont collaboré pour la première fois dans le cadre d'un atelier organisé au centre de jour de l'organisme Dans la rue.
Photo : Radio-Canada / Jérôme Gill-Couture
Depuis plusieurs années déjà, le rappeur mi'kmaw Quentin Condo, alias Q052, donne des ateliers de hip-hop et de rap à des jeunes, un peu partout au Québec. Cette fois-ci, il s'est allié à Christian Nabinacaboo, alias Naskapi9, pour donner un atelier de deux jours au centre de jour de l'organisme Dans la rue, qui vient en aide aux jeunes en situation d'itinérance à Montréal.
C'est dans l'après-midi de la seconde journée de l'atelier qu'Espaces autochtones s'est rendu sur place. La dynamique de groupe étant bien installée, ils étaient déjà prêts à présenter deux enregistrements que les six jeunes participants avaient composés en l'espace de quelques heures.
Je donne des ateliers à des jeunes de différents âges et avec différents background, et les gars ici avaient presque tous déjà fait du rap, ils avaient déjà un certain niveau
, explique d'entrée de jeu Quentin.
Effectivement, certains d'entre eux avaient déjà enregistré quelques chansons ou écrivaient des textes depuis des années.
La première journée, on apprend à se connaître et on parle de l'histoire du hip-hop. Et ensuite, on commence à créer tous ensemble
, indique Quentin Condo.
Pour lui, ces ateliers jouent un rôle important dans la vie des jeunes. C'est essentiel de permettre aux jeunes de s'exprimer artistiquement, et le rap est parfait, parce que ça leur permet de le faire autant par des textes que par la musique qui l'accompagne.
Il vante également les mérites de son acolyte, Christian, qui est vraiment bon pour créer les rythmes, et qui est capable de monter des chansons en quelques heures, [ce] qui prendrait des jours à d'autres
.
Ces compétences sont grandement appréciées par les jeunes qui suivent l'atelier. L'un d'entre eux (dont nous protégeons l'anonymat parce qu'il est mineur) explique qu'il lui sera possible d'utiliser longtemps les compétences acquises ici pour mettre en musique des textes sur lesquels il travaille régulièrement.
Déjà, avec les deux tounes qu'on a enregistrées, ça me donne un sentiment d'accomplissement, de pouvoir réaliser en musique des projets que j'avais écrits […] L'atelier va nous avoir amenés à apprendre comment utiliser le matériel et les logiciels nous-mêmes, mais aussi à travailler à plusieurs, ce qu'on va pouvoir continuer à faire après
, explique-t-il.
D'autres, qui avaient déjà enregistré du contenu auparavant, insistent quand même sur la pertinence de l'atelier qui aura permis de créer des contacts entre plusieurs jeunes musiciens.
« Peu importe notre expérience en musique, on peut toujours apprendre des autres, parce qu'on évolue tous dans des contextes différents. »
Aider les jeunes à déjouer l'itinérance
Pour l'organisme Dans la rue, il est particulièrement important de susciter ce sentiment d'accomplissement chez les jeunes. L'organisme a été créé en 1988 par le père Emmett Johns Pops
et offre un accompagnement à environ 1000 jeunes de Montréal pour les aider à déjouer
l'itinérance.
80 jeunes visitent le centre de jour quotidiennement
, explique Cécile Arbaud, la directrice générale de l'organisme, lors de la visite d'Espaces autochtones.
Pour la plupart, ils viennent de milieux familiaux difficiles ou sortent des centres jeunesse. Ici, ils ont accès à des repas complets, de l'accompagnement scolaire, juridique et médical, et ils peuvent également suivre plusieurs activités et ateliers
, ajoute-t-elle.
Les ateliers d'art et de musique sont probablement la chose la plus stimulante que l'on peut leur offrir, affirme-t-elle, alors c'est très important. Il y a quelques années, on a enregistré des albums de rap avec des jeunes et, parfois, on aide aussi des jeunes à exposer ou à vendre des œuvres d'art qu'ils ont pu réaliser ici.
Le hip-hop et le rap sont des catalyseurs dans la vie de Quentin Condo. Je peux faire de la musique engagée, parler des réalités autochtones, mais aussi jouer avec mon fils, qui est le guitariste de mon groupe, dit-il. J'utilise ma musique pour tenter d'entraîner des changements sociaux, et si je peux inspirer d'autres jeunes à faire de même, alors j'aurai réussi mon objectif.
Celui qui fait des ateliers dans tous les milieux, allant des communautés autochtones éloignées aux grandes villes, indique vouloir par cela aider les jeunes de partout à s'exprimer artistiquement, pour qu'ils puissent avoir les outils pour laisser leur marque et tenter d'entraîner, à leur manière, des changements sociaux
.