81 dossiers du pensionnat Sainte-Anne en Ontario seront réexaminés

Des centaines de jeunes Autochtones ont fréquenté le pensionnat Sainte-Anne entre 1904 et 1976.
Photo : Algoma University
Un fonctionnaire nommé par la Cour supérieure de l'Ontario a conclu que 81 dossiers d'indemnisation concernant des survivants du pensionnat Sainte-Anne devaient faire l'objet d'un « examen approfondi ». Il a estimé que les conclusions ont pu être influencées par le fait que certaines preuves n'ont pas été divulguées par le gouvernement fédéral.
Selon un rapport déposé à la cour le 17 août, le juge à la retraite Ian Pitfield a constaté que dans certains de ces 81 cas, des survivants n'ont reçu aucune indemnisation ou ont reçu une indemnisation inférieure à leur demande initiale. La raison invoquée est que leur témoignage manquait de crédibilité.
M. Pitfield a été nommé en avril pour examiner 427 cas d'indemnisation résolus avant qu'un tribunal ontarien n'ordonne au gouvernement fédéral, en 2014 et 2015, de remettre des milliers de dossiers de police liés au pensionnat Sainte-Anne.
Il s’agissait à l’époque du gouvernement conservateur.
Ces dossiers proviennent d'une enquête de la police provinciale de l'Ontario lancée en 1992 sur des abus physiques et sexuels généralisés dans le pensionnat Sainte-Anne, situé sur la côte de la baie James, dans le Nord de l'Ontario.
L'enquête a duré six ans et a produit des milliers de pages de documents, dont environ 900 déclarations de 700 victimes décrivant des agressions, des agressions sexuelles, des morts suspectes et une multitude d'autres abus.
Les survivants de Sainte-Anne ont lutté contre le gouvernement libéral actuel au cours des six dernières années pour obtenir la réouverture de ces dossiers d'indemnisation. Ils faisaient valoir que les preuves supprimées dans les dossiers de la police auraient corroboré les allégations d'abus qui n'ont pas été crues.
Le survivant Edmund Metatawabin, qui a été l'une des principales voix du litige en cours, a déclaré qu'il connaît une femme qui a été agressée sexuellement à plusieurs reprises par un évêque de l'école, mais qui n'a pas été crue parce qu'il n'y avait pas de témoins.
Quelqu'un qui a reçu une gifle une ou deux fois serait cru, parce que le montant de la compensation et la gravité des allégations seront assez faibles
, a-t-il déclaré.
Avec les dossiers de la Police provinciale de l'Ontario en main, M. Metatawabin croit que ces allégations sérieuses n'auraient pas été aussi facilement rejetées par les arbitres décidant des montants d'indemnisation.
La réévaluation de M. Pitfield n'est toujours pas satisfaisante, selon M. Metatawabin, car les survivants n'ont pas la possibilité de retenir les services d'un avocat ou de donner leur avis.
Vous les traitez comme des numéros. Vous ne connaissez pas leur personnalité, leur identité, la nature de leur souffrance ou les conséquences de leur souffrance
, a déclaré M. Metatawabin.
La Convention de règlement relative aux pensionnats a créé un mécanisme d'indemnisation en 2006, connu sous le nom de Processus d'évaluation indépendant (PEI). Dans le cadre du PEI
, des adjudicateurs entendaient les témoignages des survivants pour déterminer les montants des indemnités qu’ils allaient pouvoir percevoir.Le gouvernement fédéral fournissait la majeure partie des preuves documentées pour les réclamations et pouvait également contester les allégations d'abus.
Pendant les sept premières années du PEI
, le ministère fédéral de la Justice, sous le gouvernement Harper, a refusé de divulguer des milliers de pages de dossiers de la Police provinciale de l'Ontario, qui concernaient Sainte-Anne.Le gouvernement Trudeau a ensuite dépensé des millions de dollars pour lutter contre les tentatives des survivants de l'école Sainte-Anne de rouvrir les dossiers d'indemnisation en raison du refus du ministère de la Justice de divulguer les dossiers de la police et des tribunaux.
Mais alors que le processus du PEI
touchait à sa fin, la ministre Relations Couronne-Autochtones Carolyn Bennett a demandé à la Cour de l'Ontario de revoir les dossiers d'indemnisation de Sainte-Anne.Je pensais qu'ils ouvriraient un processus différent, qu'ils le prendraient très au sérieux et qu'ils auraient le plus haut degré d'engagement et de respect pour ces survivants et qu'ils ne les traiteraient pas comme des numéros
, a déclaré Mary Ellen Turpel-Lafond, ancienne juge et directrice du Indian Residential School History and Dialogue Centre de l'Université de Colombie-Britannique.
Mme Turpel-Lafond a dit qu'elle s'attendait à ce que le gouvernement fédéral mette en place un processus davantage axé sur les traumatismes, avec du personnel qualifié qui se rendrait auprès des survivants de Sainte-Anne pour leur expliquer le processus.
Chaque fois qu'un autre survivant est réduit à un numéro, c'est une autre tentative de minimiser et de dire : nous ne vous croyons pas. Vous ne comptez pas
, ajoute-t-elle encore.
Le processus, tel qu'il a été créé, ne profite qu'au Canada, et non aux survivants, croit-elle.
La ministre des Relations Couronne-Autochtones, Carolyn Bennett, qui se présente à nouveau comme candidate libérale dans la circonscription de Toronto-St. Paul's, n'a pas répondu à une demande de commentaire.
Nous reconnaissons que cette situation est difficile pour de nombreux survivants de la Sainte-Anne, leurs familles et leurs communautés
, a indiqué un communiqué émis par le ministère.
En plus des soutiens de programme existants, le Canada s'engage à fournir un financement destiné au soutien de la santé pour les demandeurs de Sainte-Anne pendant ce processus. Les discussions avec les représentants des survivants sont en cours
.
Le candidat néo-démocrate de Timmins-Baie James, Charlie Angus, qui a fait pression pour la révision du dossier de Sainte-Anne en tant que député, a déclaré qu'il a vu comment les batailles juridiques en cours avec le gouvernement libéral ont usé et retraumatisé les survivants de Sainte-Anne.
Nous l'avons toujours dit : il n'y a pas de réconciliation possible au Canada sans que justice soit rendue aux survivants de Sainte-Anne
, a-t-il ajouté.
Avec les informations de CBC