Nish, un premier roman jeunesse pour Isabelle Picard

Publié aux Éditions les Malins, Nish - Le Nord et le Sud, un roman jeunesse signé Isabelle Picard, sort en librairie le 29 avril.
Photo : Radio-Canada / Anne-Marie Yvon
Prenez note que cet article publié en 2021 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Le premier d’une série d’ouvrages destinés aux 10-14 ans, ancrés dans le monde et la culture des premiers peuples, sort cette semaine. Signé par l’ethnologue wendat Isabelle Picard, Nish - Le Nord et le Sud raconte le quotidien de jeunes Autochtones qui vivent en communauté éloignée tout en soulignant l’universalité de certaines réalités.
En innu-aimun, Nish veut dire deux. Dans le roman d’Isabelle Picard, deux représente les protagonistes dont elle suit les aventures, des jumeaux issus de deux nations autochtones. Deux mondes aussi, l’un en territoire, l’autre en milieu urbain. Nish c’est également deux réalités, celle des Autochtones et celle des non-Autochtones.
Isabelle Picard s’adresse pour la première fois à un jeune lectorat. Habituée à écrire des chroniques ou à publier des prises de position, l’autrice avait « envie de légèreté » et envie de revenir à l’essentiel, « parce que quand t’écris pour des jeunes, t’as pas le choix d’aller à l’essentiel ».
Le point de départ de son histoire est Matimekush, une communauté innue d’un peu plus de 600 habitants, enclavée dans la municipalité de Schefferville, sur la Côte-Nord du Québec.
Elle-même l’a découverte il y a une vingtaine d’années, lorsqu’elle avait organisé un échange étudiant entre des 6e années du primaire de l’école Wahta' de Wendake et les écoles primaires de Matimekush et Kawawachikamach, le seul village de la nation naskapie au Québec, situé non loin de là.
Ces jeunes-là m’avaient marquée
, se rappelle-t-elle. Elle y avait retrouvé une liberté qu’elle-même avait connue enfant dans sa propre communauté.
Elle s’était alors dit qu’il fallait que les gens d’ailleurs au pays sachent comment ça se passe dans une communauté du Nord et qu’elle le raconterait. « J’ai voulu à travers [ce livre] montrer comment le territoire pouvait influencer notre façon de vivre. »

Isabelle Picard
Photo : Avanti Groupe / Karine Dufour
Pendant près de 300 pages, les lecteurs suivent donc les allées et venues d’Éloïse et de Léon à l’école, à l’aréna ou sur le territoire.
Pour Isabelle Picard, le roman permet d’expliquer des pans de l’histoire des Autochtones, par exemple le séjour de plusieurs d’entre eux dans les pensionnats.
- Léon, pourquoi tu ne voulais pas que je parle des pensionnats, l’autre jour?
- Ben voyons Élo, t’as pas senti que c’était un sujet difficile dans la famille? […]
- Il y a plein de gens qui sont revenus de là traumatisés.
-Traumatisés de quoi?
- C’était pas un camp de vacances, mettons.
Elle en profite aussi pour raconter l’histoire de cette communauté innue, déplacée de Lac John vers son emplacement actuel lors de la création des mines dans la région.
[…] - Quand la compagnie de mine est partie, ils ont démoli 300 maisons que la compagnie avait bâties quand ils sont arrivés. Nous, on en avait besoin de ces maisons-là.
- Tshekuanitshe nenu ut tutahku ? [ Pourquoi ils ont fait ça?] Pourquoi ? demande ma soeur.
- La vérité? Je pense qu’ils ne voulaient pas que les Indiens prennent leurs maisons.
La famille est un thème récurrent de l’ouvrage, tout comme la vie en communauté, et pour captiver ses lecteurs, elle aborde des sujets universels : l’amitié, l’amour et… le hockey.
Pour ne pas faire de faux pas sur ce dernier point, elle a d’ailleurs consulté ses deux garçons.
Écrire un livre qui se déroule dans une communauté innue sans le parsemer de phrases dans la langue de cette nation était inimaginable pour Isabelle Picard, qui espère que les Autochtones s’approprieront le roman.
« Il n'y a pas tant de littérature jeunesse écrite par des Autochtones », fait-elle remarquer « et je me dis qu’il faut que cette langue soit valorisée, qu’ils la voient ».
Dans le deuxième tome de la série Nish, qui en comptera trois ou plus, la langue wendat viendra également stimuler l’imaginaire des lecteurs.
Isabelle en profitera aussi pour développer son histoire autour du choc culturel vécu par ses deux protagonistes venus vivre dans une communauté autochtone urbaine.
L’autrice souhaite, avec Nish, rallier un lectorat autant de garçons que de filles. Elle ajoute s’être également lancée dans cette aventure littéraire pour les non-Autochtones, « pour qu’ils puissent découvrir une autre réalité, un autre territoire, d’autres façons de penser, de faire ».
La couverture du roman d’Isabelle Picard a été illustrée par Tara Miller, une Malécite installée à Toronto. Le dessin « s’inscrit dans la culture autochtone, mais s’inscrit dans l’époque dans laquelle on est », souligne l’écrivaine.
Publié aux Éditions les Malins, Nish - Le Nord et le Sud sort en librairie le 29 avril.