Les 10 événements qui ont marqué l’actualité autochtone en 2018
Prenez note que cet article publié en 2018 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Apuiat, Kanata, Colten Boushie... Les 12 derniers mois ont été marqués par des événements riches en rebondissements pour les Autochtones du pays. Deux commissions d'enquête se sont achevées après un parcours douloureux, mais nécessaire. D'autres moments importants ont émaillé la vie des communautés d'un océan à l'autre comme la légalisation du cannabis ou le pipeline Trans Mountain qui n'a pas fini de créer des remous. Retour sur 10 faits marquants.
1. FIN DE DEUX COMMISSIONS D'ENQUÊTE

Lors d'une conférence de presse à Winnipeg, le 12 juillet 2017, demandant une réorganisation de l'enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, Delores Daniels tient une photo de sa fille Serena McKay, assassinée à Sagkeeng au Manitoba.
Photo : La Presse canadienne / John Woods
L’année 2018 aura vu la conclusion de deux importantes commissions d’enquête. Celle pancanadienne sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées devra rendre son rapport final en mai prochain. Sévèrement critiquée notamment par les familles, l’enquête mise en place par le gouvernement libéral de Justin Trudeau a été ponctuée par une série de démissions et de licenciements.
Les communautés autochtones attendent également beaucoup de la Commission Écoute, réconciliation et progrès mise en place en 2016 par l’ancien gouvernement de Philippe Couillard. Le commissaire Jacques Viens a tenté de mettre en lumière les enjeux systémiques caractérisant la relation entre les Autochtones et les intervenants de certains services publics de la province. Le rapport sera déposé le 30 septembre 2019.
2. JUSTICE : DEUX POIDS, DEUX MESURES?

Les noms de plusieurs personnes autochtones sont écrits sur un trottoir avant que des étudiants de l'Université de Victoria se mettent en grève pour sensibiliser le public à la discrimination systémique au sein du système de justice canadien, le mercredi 14 mars 2018.
Photo : La Presse canadienne / Chad Hipolito
L'acquittement en février de Gerald Stanley, un fermier blanc accusé du meurtre au second degré du jeune Colten Boushie, un Cri de 22 ans originaire de la Première Nation Red Pheasant, à l’ouest de Saskatoon, a ravivé de fortes tensions raciales en Saskatchewan et au pays. Des manifestations ont été organisées un peu partout au Canada, plusieurs dénonçant un système de justice « à deux vitesses ». Parmi les 12 membres du jury au procès de Gerald Stanley, aucun n’était autochtone.
3. TRANS MOUNTAIN CONTINUE DE SOULEVER LES PASSIONS

Les gens se sont rassemblés à Vancouver pour célébrer une décision de la Cour fédérale contre l'extension du pipeline Kinder Morgan, le samedi 8 septembre 2018.
Photo : La Presse canadienne / Darryl Dyck
En achetant le pipeline Trans Mountain à la compagnie pétrolière texane Kinder Morgan au coût de 4,5 milliards de dollars, le gouvernement Trudeau a soulevé les inquiétudes de nombreuses Premières Nations de l’Ouest canadien. En août dernier, la Cour d'appel fédérale a d’ailleurs annulé le projet d’expansion du controversé oléoduc, estimant qu’Ottawa avait entre autres failli à son obligation de consulter les populations autochtones. Le 25 septembre à la Chambre des communes, le député néo-démocrate cri Roméo Saganash a dénoncé l'attitude du gouvernement libéral. Justin Trudeau « n'en a rien à foutre des droits des Autochtones », a-t-il lâché.
4. PROJECTEUR SUR L’APPROPRIATION CULTURELLE

Une scène de la pièce « Kanata »
Photo : Courtoisie/Théâtre du Soleil
Cette année, deux productions artistiques ont été au cœur du débat sur l’appropriation culturelle. Après SLĀV, le dramaturge Robert Lepage s’est vu accuser par une vingtaine de personnalités autochtones de ne pas avoir engagé des acteurs issus des Premières Nations dans la nouvelle création Kanata. Dans une lettre rendue publique, elles ont dénoncé l’« invisibilité » des acteurs autochtones. D’abord annulée, cette pièce, censée éclairer le public sur le « génocide culturel » à l'encontre des Autochtones du pays, a finalement été présentée à Paris le 15 décembre, non sans susciter de vives critiques de la part de plusieurs représentants autochtones.
5. DPJ : LES ATIKAMEKW DISPOSENT D’UNE PLEINE AUTONOMIE

Des enfants autochtones
Photo : Radio-Canada
Le Conseil de la nation atikamekw (CNA) est devenu la première nation autochtone au Québec à avoir signé une entente avec le gouvernement en vue d'instaurer son propre régime de protection de la jeunesse. Les enfants et jeunes Atikamekw de Wemotaci et de Manawan qui résident dans l’une ou l’autre de ces communautés, ou sur le territoire urbain de la Tuque, bénéficient depuis novembre du régime de la protection sociale du CNA.
Cette victoire est d’autant plus historique qu’elle est le résultat de nombreuses années de travail. Auparavant, les enfants étaient pour la plupart placés dans des familles d’accueil extérieures et les dossiers jeunesse étaient surtout pris en charge par des ressources hors communauté, chez les non-Autochtones.
6. ÉPIDÉMIE DE SUICIDES CHEZ LES INUITS DU QUÉBEC

Rebecca Hookimaw est entourée par sa famille et ses amis pendant qu'elle raconte l'histoire de sa tentative de suicide dans la réserve des Premières nations du nord de l'Ontario à Attawapiskat, le lundi 16 avril 2016.
Photo : La Presse canadienne / Nathan Denette
Selon les données compilées par plusieurs médias, 15 personnes se sont suicidées dans le Grand Nord québécois, dont 11 à Puvirnituq, petit village de 1 779 habitants situé dans la baie d'Hudson. À titre de comparaison, c’est comme si 17 000 résidents se suicidaient chaque année à Montréal. La Régie régionale de la santé et des services sociaux du Nunavik parle d’une « situation de crise ». Rappelons qu’en 2015, la région peu peuplée a connu 13 suicides, 16 l'année suivante et 22 en 2017. Au moins 124 personnes ont perdu la vie au Nunavik au cours des neuf dernières années.
7. LA LÉGALISATION DU CANNABIS CHEZ LES COMMUNAUTÉS

Différentes sortes de cannabis vendues dans la Première Nation de Wahnapitae, dans le nord de l'Ontario.
Photo : Radio-Canada / Natacha Lavigne
La légalisation du cannabis au pays a suscité des craintes de chefs de certaines communautés, certains redoutant la contrebande ou une aggravation des problèmes de dépendance. Le Conseil des Abénakis d'Odanak, par exemple, a pour sa part opté pour un règlement interdisant la vente, la production et la distribution de cannabis sur son territoire.
D'autres communautés, au contraire, sentent des opportunités d’affaires et d’autodétermination. Le conseil de bande de Kahnawake, par exemple, est en négociation avec le géant du cannabis Canopy Growth pour construire une immense serre en territoire mohawk. Le conseil a par ailleurs adopté en décembre sa propre législation sur le contrôle du cannabis. C'est le cas aussi de la communauté micmaque de Listuguj, en Gaspésie.
8. DES FEMMES AUTOCHTONES OUVRENT LES PORTES DU CONGRÈS

Sharice Davids, 38 ans, l'a emporté au Kansas face au républicain Kevin Yoder.
Photo : The Associated Press / Colin E. Braley
Les deux candidates démocrates, Sharice Davids au Kansas et Deb Haaland au Nouveau-Mexique, ont marqué l’histoire en devenant en novembre les premières femmes autochtones à siéger au Congrès américain. Plus d'une dizaine d'hommes autochtones avaient déjà été élus, mais jamais de femmes.
La démocrate Sharice Davids est membre de la nation Winnebagos, au Wisconsin. Cette avocate de 38 ans, ouvertement gaie et ancienne adepte d’arts martiaux mixtes, a remporté les élections à la Chambre des représentants.
De son côté, Deb Haaland est une mère célibataire de 57 ans issue de la nation Laguna Pueblo. Originaire de l’Arizona, elle s’est fait élire au Nouveau-Mexique avec un programme sur la protection de l’environnement et les études universitaires gratuites.
9. PARC ÉOLIEN APUIAT : LE COUP D’ARRÊT

Des éoliennes en Gaspésie
Photo : Radio-Canada
Après plusieurs mois de controverse, l’arrivée au pouvoir de François Legault a porté un coup fatal au parc éolien Apuiat des Innus de la Côte-Nord. Le premier ministre n’a jamais caché son opposition à ce projet de 600 millions de dollars, qu’il qualifie de « non rentable ». Il a annoncé que le projet n'ira pas de l'avant tant qu'Hydro-Québec n'aura pas écoulé ses surplus. Malgré tout, les chefs innus, qui continuent de croire au projet, comptent bientôt présenter au gouvernement caquiste un plan d’action afin d’assurer la concrétisation du projet qui « doit se réaliser rapidement. »
10. LES ARTISTES AUTOCHTONES AU-DEVANT DE LA SCÈNE

Photo : Dustin Rabin
Les artistes autochtones se font remarquer aussi bien chez nous qu’aux quatre coins du monde. L'écrivaine innue Joséphine Bacon est devenue cette année la première Autochtone à être l'invitée d’honneur du Salon du livre de Montréal. Le jeune ténor et compositeur Jeremy Dutcher, de la Première Nation Wolastoqiyik, a remporté le prestigieux prix Polaris en septembre pour son album Wolastoqiyik Lintuwakonawa. L'artiste multidisciplinaire algonquine, Nadia Myre, a vu plusieurs de ses œuvres être exposées à Berlin et à Vienne, mais aussi au Musée des beaux-arts de Montréal et au Musée McCord. Le peintre cri Kent Monkman a présenté une série de tableaux au nouveau Centre culturel canadien de Paris, saluée par la critique hexagonale. À Montréal, une murale de la jeune artiste atikamekw Meky Ottawa est venue rendre hommage à l’œuvre de la cinéaste abénaquise Alanis Obomsawin. L’année a aussi été marquée par le lancement de NIKAMOWIN, une plateforme de musique 100 % autochtone!