125 femmes autochtones disparues et assassinées depuis l’arrivée au pouvoir de Justin Trudeau

Femmes autochtones disparues ou assassinées.
Photo : Radio-Canada
Prenez note que cet article publié en 2018 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
La liste ne cesse de s'allonger. Depuis novembre 2015, date de l'assermentation du cabinet libéral fédéral, plus d'une centaine de femmes autochtones ont perdu la vie tragiquement ou ont été portées disparues, selon le collectif Familles de sœurs par l'esprit.
Mis sur pied en janvier 2011, ce mouvement dont le but est de sensibiliser les gens à la cause des femmes autochtones a compilé les disparitions et assassinats de femmes depuis que Justin Trudeau est au pouvoir.
Déjà, la veille de l'assermentation du cabinet libéral, Janel Squirrel, 26 ans, de la nation des Pieds-Noirs de Siksika, en Alberta, était retrouvée étranglée et battue à mort dans le sous-sol d'une maison de chambres à Calgary. Son assassin, Leo Pantherbone, a été condamné en mars 2017, à 12 ans de prison.
Le 8 novembre 2015, c’était au tour de Krystal Andrews, 22 ans, d’être tuée. La jeune femme avait téléphoné chez elle pour dire qu'elle rentrait après une activité sociale dans la Première Nation de God's Lake, une communauté crie du nord du Manitoba. Le lendemain, elle était retrouvée morte le long d'un sentier boisé. Son meurtrier, Michael William Okemow, 37 ans a été accusé en mars dernier de meurtre au second degré.
Les cas d’assassinat ou de mort suspecte de femmes autochtones n’ont cessé de s’ajouter depuis. Le nom de toutes ces femmes a été lu le 4 octobre, sur la colline du Parlement à Ottawa, lors d’une veille tenue annuellement par l’Association des femmes autochtones du Canada (AFAC) et le collectif Familles de sœurs par l’esprit, afin de ne pas les oublier.
Et la liste s’allonge
Quelque 78 cas d’homicide ont été recensés depuis novembre 2015, dont 68 ont mené à des accusations, selon des données établies par le collectif et fournies à CBC News.
À cela, il faut ajouter 37 cas de morts suspectes, 6 personnes mortes lors d’une garde à vue et 3 autres alors qu’elles étaient sous les services de protection de la jeunesse. Josephine Pelletier, 33 ans, de la Première Nation Muskowekwan a quant à elle été tuée par la police de Calgary le 17 mai dernier.
L'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées (ENFFADA) étant une promesse phare de Justin Trudeau, l’organisme Familles de sœurs par l’esprit a donc choisi l’arrivée au pouvoir de son gouvernement pour dresser cette liste.
Le mandat de l’ENFFADA ne permet pas d’examiner de près les actions policières dans des cas précis, ce qui désole Bridget Tolley, l'une des fondatrices du groupe.
« Ils ont dit qu'ils allaient nous aider », dit Mme Tolley, dont la mère, Gladys Tolley, a été happée mortellement par une autopatrouille de la Sûreté du Québec (SQ), à Kitigan Zibi, en 2001. Elle ajoute que « Trudeau a promis de faire mieux. »

Bridget Tolley lors d'une manifestation
Photo : La Presse canadienne
Kristen Gilchrist, une chercheuse indépendante d’Ottawa qui a compilé la liste, espère que les citoyens canadiens réaliseront la violence subie sans relâche par les femmes autochtones. Cette dernière a choisi d’inclure les morts suspectes dans la liste, précisant que la police s'était trompée lors de précédentes enquêtes.
Selon la chercheure, les morts survenues lors d’une détention ou alors que la personne était sous la responsabilité des services de protection de la jeunesse, sont causées par un système défaillant.
Le dernier rapport officiel de la GRC, publié en 2014, rapportait 1181 cas de femmes autochtones disparues et assassinées entre 1980 et 2012.
Kristen Gilchrist considère ce compte rendu non concluant, car il repose principalement, selon elle, sur des reportages dans les médias ou sur ce que rapportent les familles des victimes sur les médias sociaux.
Le décompte de la GRC n’inclurait pas tous les cas de femmes autochtones disparues. « Il faut tripler le nombre de personnes disparues », croit Maggie Cywink, qui a assisté à la veillée du 4 octobre sur la colline du Parlement pour rendre hommage à sa sœur Sonya, dont le meurtre survenu en 1994 n'a toujours pas été résolu.
Le colonialisme a créé le problème et la mentalité coloniale tente de le résoudre.

Maggie Cywink, regarde des écrits de sa sœur Sonya.
Photo : Radio-Canada / Philippe de Montigny
Un communiqué de l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées rappelle que « la dure vérité est que chaque jour qui passe, de plus en plus de membres de nos communautés endurent des souffrances et des pertes indicibles ».
On y écrit également que ce ne serait pas le cas « si nous prenons les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et le bien-être de notre prochaine génération de filles, de petites-filles et de nièces. »
L’ENFFADA espère que les Canadiens donneront suite aux recommandations de son rapport final, qui sera présenté en avril 2019.
Le bureau de la ministre des Relations Couronne-Autochtones, Carolyn Bennett, a de son côté publié une déclaration selon laquelle la création de l'enquête nationale était une « étape importante » pour permettre aux familles d’obtenir des « réponses » sur « les défaillances systémiques et institutionnelles qui ont conduit à cette tragédie ».
Bridget Tolley considère que la lutte doit se poursuivre localement, peu importe ce que fait le gouvernement. « Nous allons continuer jusqu'à ce que la vérité soit révélée, jusqu'à ce que justice soit rendue », conclut-elle.
D'après un texte de Jorge Barrera
Avec les informations de CBC