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- Pyrite: 20 ans plus tard, encore des poursuites! -

1er mai 2007 - Les lois sont faites pour protéger les citoyens, pour maintenir la justice entre eux. Il arrive toutefois qu'elles créent des injustices. Si quelqu'un achète une maison, par exemple, un article du Code civil du Québec le protège de façon illimitée contre les vices cachés qui pourraient l'affecter. L'intention est excellente, mais dans certains cas, cet article de la loi engendre des situations absurdes.

Journaliste: Julie Vaillancourt
Réalisatrice: Martyne Bourdeau
__________


Francine et Réjean, qui ont déjà été propriétaires, habitent aujourd’hui un petit logement à Drummondville. Le souvenir de leur ancienne maison est toutefois récemment venu les hanter et ils doivent maintenant se débattre pour éviter d’être tenus responsables de ce qui lui est arrivé longtemps après qu'ils l'aient vendue.

Le couple avait fait construire sa première maison à Saint-Guillaume en 1972. Elle a été vendue en 1990. Il y a deux mois, Francine et Réjean ont eu un choc en recevant une mise en demeure: les propriétaires actuels venaient de découvrir de la pyrite au sous-sol.

« Quand ils ont parlé d’un problème de pyrite, nous nous sommes regardés et nous nous sommes dit: ''C’est quoi ça, la pyrite?'' », raconte Francine.

« Je ne savais pas de quoi ils parlaient. Je leur ai même demandé si c’était une maladie. C’était la première fois que j’entendais parler de ça », ajoute Réjean.

Le cauchemar des propriétaires

La pyrite, c'est le cauchemar des propriétaires. À la fin des années 90, plusieurs réunions d'information ont été organisées, question de comprendre la nature du problème.

Les propriétaires ont alors appris que ce minerai utilisé par les entrepreneurs gonfle au contact de l'eau et qu’il provoque de grosses fissures dans les fondations des maisons. Les réparations coûtent souvent plus de 20 000 $.

L'autre problème, c'est que les dommages causés par la pyrite peuvent prendre jusqu'à 40 ans à apparaître. Une maison peut alors avoir appartenu à plusieurs personnes. Tous ceux qui ont été propriétaires poursuivent le propriétaire précédent pour vice caché. C’est ce qu’on appelle un effet domino.

Dans le de Francine et Réjean, la propriétaire actuelle de la maison a envoyé une mise en demeure à la propriétaire précédente. C’est cette dernière qui s'est retournée contre eux.

« Tout le monde poursuit tout le monde. Il aurait fallu que nous poursuivions l’entrepreneur, explique Francine. Imaginez, ça fait 34 ans! L’entrepreneur, il faut le trouver. [Dans notre cas], il est mort. Alors, nous n’avons pas de recours. Ça n’a quasiment pas d’allure! Cette histoire va-t-elle nous suivre toute notre vie? »

La réponse à cette question est malheureusement oui. Au Québec, le Code civil ne prévoit pas de limite dans le temps pour poursuivre quand il s’agit d’un vice caché. Il est donc possible de poursuivre quelqu’un pour quelque chose survenu 30 ans, 40 ans, voire 50 ans après la construction d'une maison!

Programme de subventions

« Il n’y a pas de bonne cause dans les cas de vices cachés. La loi est claire: vous êtes responsables », indique André Paradis, ancien président du Comité des victimes judiciaires de la pyrite, qui a lui-même été poursuivi pour avoir vendu une maison dans laquelle les nouveaux propriétaires ont découvert de la pyrite.

Le Comité a demandé au gouvernement que tous les anciens propriétaires d'une maison affectée par la pyrite puissent être subventionnés.

« La responsabilité incombe au gouvernement, qui, par négligence, n’a pas forcé les constructeurs à ne pas utiliser cette pierre-là, poursuit-il. La pyrite, c’est une cause naturelle. C’est une pierre pourrie qui a été utilisée à outrance. Est-ce que le propriétaire d’une maison est responsable? Ce n’est pas lui qui a pelleté la terre pour la mettre sous sa maison! »

Le gouvernement a réagi en donnant à la Société d'habitation du Québec (SHQ) le mandat d'élaborer un programme de subventions. Quelque 1600 propriétaires qui avaient de la pyrite dans leur sous-sol ont reçu environ 8000 $ chacun. Toutefois, seulement le dernier propriétaire, celui qui découvre la pyrite, est dédommagé avec ce programme.

André Paradis, qui était en plein milieu de la chaîne de poursuites, n'a donc rien obtenu. Sa mésaventure juridique lui a coûté 28 000 $.

« Je trouve ça vraiment injuste. Ça frise le ridicule. »

Des laissés-pour-compte

André Fillion
La SHQ plaide qu’il est impossible d’indemniser chaque personne qui a été propriétaire d’une maison affectée par la pyrite.

« Nous avons des moyens limités sur le plan financier, alors nos budgets à cet égard sont quand même assez circonscrits, souligne André Fillion, vice-président, Affaires publiques et administration, à la SHQ. Nous faisons le maximum que nous pouvons avec les argents que nous avons et je ne pense pas que nous aurions les moyens de faire autre chose. »

« Je ne vois pas où est la justice là-dedans, réplique Francine. Si [les anciens propriétaires] ont le droit de revenir sur nous autres, nous aussi nous [devrions avoir droit] à une subvention. »

« Nous sympathisons beaucoup avec les personnes prises avec le problème, mais nous ne sommes pas le ministère de la Justice, nous ne sommes pas le législateur », se défend André Fillion.

Projet de loi qui avorte

En 2001, le ministère de la Justice a failli mettre un terme à l'effet domino. Un projet de loi a été élaboré en ce sens. Il faisait en sorte qu’après cinq ans, personne n'aurait pu entreprendre de poursuite dans un cas de vice caché. Le projet comportait toutefois des failles, comme le fait remarquer Me Martin Fortier, avocat spécialiste des cas de pyrite.

« Qu’est-ce qu’on fait de l’acheteur qui a acquis une maison en toute bonne foi et qui découvre, la sixième année, que son immeuble est affecté par un vice caché? On lui enlève tout recours? Est-ce ce qui est idéal dans les circonstances? Je ne le crois pas. »

Le projet a finalement été abandonné.

« On aurait créé une deuxième injustice, poursuit Me Fortier. On aurait réglé un problème en en créant un deuxième. Je pense que la situation actuelle est un moindre mal dans les circonstances. »

C'est toutefois loin d'être un moindre mal pour Francine et Réjean, qui sont à l'aube de la retraite. S'ils paient un avocat et dédommagent la propriétaire actuelle, ils feront faillite, disent-ils. Ils n'ont pas les 20 000 $ ou 30 000 $ souvent nécessaires pour régler un cas de pyrite.

« Si nous étions jeunes, nous nous dirions que nous allons nous relever, mais rendus à 65 ans, c’est difficile d’oublier ce qui nous arrive », indique Réjean.

En conclusion

Dans les cas de pyrite, les entrepreneurs ou les promoteurs s'en tirent plutôt bien. Très peu de poursuites contre eux ont abouti. On a plutôt vu des citoyens qui n'avaient rien à voir avec le problème s'entre-déchirer en cour. Et tous le spécialistes le disent, la solution à cette injustice est justement d'éviter les tribunaux. Il vaut beaucoup mieux que les propriétaires et les ex-propriétaires s'entendent à l'amiable pour partager la facture.
Hyperliens Cet hyperlien s'ouvre dans une nouvelle fenêtre de navigateur Aide aux propriétaires de bâtiments résidentiels endommagés par la pyrite
Société d'habitation du Québec

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Gomaison.com

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Association des consommateurs pour la qualité dans la construction

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