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Les
troubles mentaux, quels qu'ils soient, se traitent de plus en
plus avec de petites pilules, les antidépresseurs. Les
Canadiens en consomment cinq fois plus qu'il y a 20 ans. Au Canada,
le Paxil est l'antidépresseur le plus prescrit par les
médecins. Les ventes records de Paxil dans le monde ont
rapporté 3 milliards de dollars américains à
son fabricant, GlaxoSmithKline, l'an dernier. Comme les autres
médicaments de sa famille, dont le célèbre
Prozac, il assure la circulation de la sérotonine d'un
neurone à l'autre. Cette sérotonine se transmet
mal chez les gens déprimés. Ces médicaments
ne créent pas une dépendance comparable au Valium
et ils ont moins d'effets secondaires. Or, aujourd'hui, certains
se demandent si le Paxil est aussi «miraculeux» qu'on
le dit, puisqu'il n'est pas si simple d'arrêter.
Le psychiatre David Bakish, directeur de la Clinique de psychopharmacologie
d'Ottawa, effectue des essais cliniques pour plusieurs fabricants
d'antidépresseurs, dont GlaxoSmithKline. Il constate que
le Paxil cause davantage de problèmes au sevrage que le
Prozac, parce que le Paxil se dissipe dans le sang après
seulement 24 heures. M. Bakish croit aussi, sans en avoir fait
la preuve, que le médicament affecte un récepteur
bien particulier. Tout le coeur de la controverse réside
dans cette question: est-ce que les patients sont prévenus
que l'arrêt du médicament peut être difficile?
Écoute
du reportage
Format WindowsMedia
Des
recours collectifs se sont abattus sur GlaxoSmithKline en Angleterre,
aux États-Unis et au Canada. Dans une poursuite, on affirme
que l'arrêt du Paxil peut causer des vomissements, des sensations
de chocs électriques, des vertiges, de l'agressivité,
des cauchemars et de l'anorexie. Sur les millions de consommateurs
de Paxil, on ne sait combien sont victimes de ces symptômes
ni avec quelle sévérité. Personne ne s'entend
là-dessus. Les recours collectifs canadiens et américains
allèguent en plus que le Paxil crée une dépendance,
alors que la publicité américaine dit le contraire.
Des millions de dollars en dédommagements sont en jeu.
Une poignée d'avocats d'américains a tenté
de faire retirer des ondes la publicité controversée,
mais un juge californien vient de donner raison à GlaxoSmithKline.
Il n'y a aucune preuve de dépendance au Paxil.
Le
Paxil est sur le marché depuis neuf ans. GlaxoSmithKline
mentionne brièvement dans le Compendium lu par les médecins
certains des effets possibles à l'arrêt du médicament:
nervosité, troubles du sommeil, sensation de tête
légère et céphalées; une mise en garde
à ce point discrète que bien des médecins
ne la voient pas. Jusqu'en 1999, le Compendium destiné
aux patients est carrément muet sur la question du sevrage.
Ce n'est qu'en 2000 que la compagnie énumère quelques
symptômes. Or, on sait que des études scientifiques
dans des revues psychiatriques révèlent les problèmes
de sevrage dès 1994. En décembre dernier, à
la demande de la Food and Drug Administration aux États-Unis,
GlaxoSmithKline a changé sa monographie en y ajoutant que
les patients qui arrêtent le Paxil doivent être suivis.
Pour évaluer leurs symptômes, Glaxo-Canada a emboîté
le pas, en écrivant que les manifestations sont légères
ou modérées.
Les tribunaux trancheront à savoir si Glaxo a fait suffisamment
preuve de transparence . Entre-temps, les médecins doivent
eux-mêmes faire la part des choses. Les gens qui intentent
une poursuite assurent qu'ils ne font pas cette croisade pour
l'argent, mais bien pour que d'autres ne vivent pas ce qu'ils
ont vécu Les recours collectifs prendront des années
à aboutir. D'ici là, ils aimeraient que GlaxoSmithKline
fasse amende honorable. Beaucoup pensent qu'il ne faut surtout
pas créer d'affolement chez les millions d'utilisateurs
du Paxil, une population déjà fragile. L'efficacité
du Paxil n'est remise en cause par personne, mais à l'heure
où l'on prescrit des antidépresseurs à toutes
les sauces, il faut donner à chaque patient l'information
nécessaire pour faire un choix éclairé.
quitpaxil.org
Frank Streicher est le créateur de «quitpaxil.org»,
un site Internet destiné aux gens qui éprouvent
des problèmes de sevrage. M. Streicher accuse le
fabricant de Paxil de ne pas avoir donné toute l'information
sur les symptômes possibles à l'arrêt
de cet antidépresseur.
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