Les
faits
En
juin 2000, un couple de travailleurs autonomes achète un duplex
pour consolider leur avenir financier. Et pour diminuer leur frais
de chauffage, ils se font installer un an et demi plus tard une «UCE»,
une unité de conservation énergétique.
«C'était alléchant à quelque
part, parce que si on regarde la mensualité pour payer l'UCE
et puis notre dépense d'huile, ça "s'autopayait"
tout seul.»
Grâce
à ce nouveau système, l'entreprise garantit une consommation
hivernale maximale en mazout de 209,40 $ et ce, pour les dix prochaines
années. Une garantie que le commerçant s'engage d'ailleurs
à mettre par écrit. De plus, la compagnie promet de
rembourser toute consommation excédentaire de mazout.
Or le jour de
l'installation de l'appareil, le vendeur se présente chez le
couple avec une lettre contractuelle incomplète : ni la durée
de 10 ans ni l'excédent de consommation ne sont spécifiés.
Vu l'absence de ces clauses, le couple refuse de signer le contrat.
Le
commerçant accepte finalement d'ajouter les deux clauses
au contrat. Le couple demeure tout de même perplexe
:
«Je me suis dit, ça vaut quoi ça maintenant?»
Selon
maître Michel Brisebois, les clients n'ont aucune
raison de s'inquiéter en signant ce contrat, car ils
sont doublement protégés : «L'article
42 de la Loi de la protection du consommateur est clair en
ce sens que toute déclaration verbale ou écrite
faite par un représentant d'un commerçant ou
d'un fabricant lie ce commerçant ou ce fabricant».
De plus, «L'article 17 de la Loi sur la protection
du consommateur nous dit que dans le cas d'un doute ou d'une
ambiguïté, les dispositions du contrat doivent
être interprétées en faveur du consommateur»,
ajoute Me Brisebois.
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L'unité
de conservation énergétique est installée en
novembre 2001 mais déjà au début de l'hiver,
le couple doute des formidables économies de chauffage :
Tout
compte fait, leur facture de chauffage de l'hiver dernier n'était
pas de 209 $ comme promis, mais bien de 1385$!
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L'avis d'un spécialiste
La consommation
de mazout, évaluée à 209,40$ pour toute la période
hivernale, «est impossible à réaliser» pour
ce duplex, estime Éric Vezaine, spécialiste de thermopompes.
La
Facture a demandé à celui-ci d'évaluer le
fameux appareil qui est, selon le représentant de la compagnie,
encore plus performant qu'une thermopompe. Le spécialiste,
lui, n'en croit pas un mot : «Une UCE, unité de conservation
énergétique, est en fait une thermopompe bien
standard. UCE: j'appellerais ça plus un logo de vente, une
forme de nouveau nom, un style marketing pour vendre le produit».
Une
mauvaise surprise
Le
spécialiste estime que la capacité de la thermopompe
(soit 2,5 tonnes) n'est pas suffisante pour ce type de bâtiment.
Résultat : le compte d'électricité
du couple a doublé l'hiver dernier.
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Deuxième
surprise désagréable : il s'agirait d'un appareil de
moindre qualité: «Le compresseur est enfermé
dans un petit boîtier métallique (en raison du bruit
qu'il génère). Généralement quand on voit
ça, c'est qu'il s'agit d'un compresseur bas de gamme»,
explique le spécialiste.
Quels
sont les prix du marché?
Le
spécialiste estime que les clients auraient pu payer moins
cher, en magasinant un peu leur thermopompe : «Environ 1500
à 2000 dollars de moins», estime M. Vezaine. Question
d'avoir l'heure juste, l'équipe de La Facture a consulté
trois marchands du Grand Montréal. Or, les prix nous démontrent
bien que le couple aurait été agréablement surpris
en magasinant :
* Par
exemple, chez Industrie Métropole inc., un modèle
de base équivalent se vend à 5 233 $, taxes
incluses.
* Le couple
a choisi de payer leur thermopompe en dix ans. Avec les intérêts,
le coût de l'appareil totalise près de 12,800
$.
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En
calculant, le couple a constaté qu'il commencerait à
faire des économies d'énergie au bout de 15 et 20 ans.
Or, «La thermopompe a une durée de vie moyenne de
10 à 15 ans», indique M. Vezaine. «L'appareil
sera donc hors d'état avant qu'ils ne réalisent les
économies promises».
«On se
sent dupés parce que c'était une économie d'énergie
qu'on achetait. C'était une réduction beaucoup plus
importante que ça, en économie d'huile.»
- affirme madame.
En conclusion
Lors
du tournage de ce reportage en septembre, la compagnie avait coupé
la communication avec le couple. La consommation excédentaire
de mazout de l'hiver dernier n'avait pas encore été
remboursée comme le stipule le contrat. La direction de l'entreprise
a refusé de nous accorder une entrevue. Quant aux clients,
ils tiennent fermement à ce que toutes les clauses de leur
contrat soient respectées.
«On va
aller jusqu'au bout, on a droit aux 10 ans. Ils vont nous rembourser
chaque année. (
) On va se battre, ça va faire
partie aussi de notre retraite. Quand on se bercera sur le perron,
au moins, on aura la satisfaction d'avoir été jusqu'au
bout.»
Depuis la fin
de notre enquête, le dossier a évolué. La compagnie
semble reconnaître la validité du contrat puisque le
couple a paraphé un règlement à l'amiable avec
celle-ci. Les clauses de ce règlement demeurent toutefois confidentielles.