Société
Le village des Tanneries, histoire d'un lieu fondateur
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Site archéologique du village des Tanneries à Montréal sous l'échangeur Turcot Photo : Laurence Dompierre-Major
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Au début du 19e siècle, c'est un carnage absolu dans les forêts avoisinantes de Montréal. Des milliers d'orignaux, de rats musqués, de renards et de castors sont tués pour ravitailler l'industrie florissante du cuir à Montréal. C'est à l'extrémité ouest du quartier Saint-Henri, sous les restes de l'échangeur Turcot et face aux vestiges du village des Tanneries, que nous avons rencontré Jean-François Nadeau.
Le site archéologique du village des Tanneries comptait au 18e siècle huit tanneries où l'on traitait les peaux et le cuir. La décision du gouvernement du Québec et de la Ville de Montréal de détruire ce site archéologique suscite l'indignation des défenseurs du patrimoine. Ce n'est pas sans raison puisque, comme l'explique l'historien, la fourrure et le cuir ont été un vecteur considérable de développement à Montréal.
En 1685, une première tannerie est ouverte près de la décharge de la rivière Saint-Pierre. Les peaux trempent pendant plusieurs semaines, faisant émaner de fortes odeurs et produisant des eaux usées malodorantes. Avec la présence de petits ruisseaux, loin de la ville, l'endroit est donc idéal pour traiter les peaux et le cuir avec les différents tanins.
La famille de tanneurs de Gabriel Lenoir, dit Rolland, devient le plus grand fabricant de cuir. Le village formé en 1780, regroupant une demi-douzaine de tanneries, porte d'ailleurs le nom Tanneries-des-Rolland. En 1825, dans un village plus vaste, celui de Saint-Henri-des-Tanneries, plus de la moitié des habitants vit des métiers du cuir.
À cette époque, des milliers de bêtes sont tuées pour l'industrie. Les chiffres font frissonner : en 1804, ce sont 100 000 orignaux qui sont tués, en 1871, ce sont 184 000 rats musqués, 36 000 castors et 19 000 visons qui vivent le même sort. Mais déjà à cette époque, le gibier est en baisse et la Montreal Naturalist Society tire la sonnette d'alarme. Des chiffres qui témoignent comment Montréal est sans aucun doute une ville de fourrure et de cuir.
Montréal n'existe pas sans le cuir et la fourrure. Le village des Tanneries en est le témoin.
Publié par Le 15-18 le 16 septembre 2015