André Melançon
Parcours de vie
- Nom Complet :
- André Melançon
- Date de naissance :
- Date de décès :
- Signe distinctif :
Sa grande taille (6 pieds, 3 pouces)
- Études :
Psychoéducation à l’Université de Montréal
- Domaines d’expression :
Cinéma (réalisateur, scénariste, comédien, metteur en scène)
- Principaux films à succès (fiction et documentaire) :
En tant que réalisateur : Les trains de la vie, Daniel and the Superdogs, L’âge de passion, Le Ciel sur la tête, Nénette, Rafales, Bach et Bottine, La Guerre des tuques, Fierro… l’été des secrets, L’espace d’un été, Les vrais perdants, Comme les six doigts de la main, Les tacots, Le violon de Gaston, Des armes et les hommesEn tant que scénariste : El verano del potro, Rafales, La grenouille et la baleine, Bach et Bottine, Comme les six doigts de la main, Les tacots, Le violon de Gaston, Des armes et les hommes
En tant qu’acteur : Vercingétorix : la légende du druide roi, Joyeux calvaire, Un muro de silencio, Refugio en la ciudad, Lance et compte II, Pouvoir intime, Doux aveux, Partis pour la gloire, Taureau, Réjeanne Padovani, Les allées de la terre
- Réalisations à la télévision :
Asbestos, Ces enfants d’ailleurs, Cher Olivier
Adaptation télévisuelle et mise en scène de pièces de théâtre : Albertine, en cinq temps; La promesse de l’aube- Prix et récompenses :
Prix Jutra-Hommage pour l’ensemble de sa carrière, prix Albert-Tessier, Championnat de la LNI comme entraîneur, Grand prix du public au deuxième Festival international de films pour enfants de Chicago (La Guerre des tuques), Palme d’or au 14e Festival international du film de Moscou (La Guerre des tuques), Grand prix du Festival au troisième Festival international de cinéma jeune public de Laon (La Guerre des tuques), prix Bobine d’or pour le film ayant obtenu les meilleures recettes (La Guerre des tuques)
- Lieu de naissance :
Rouyn-Noranda
Biographie
L’amour pour le jeu habite André Melançon depuis son enfance alors qu’il utilise le garage familial pour créer des pièces sous le regard admiratif et encourageant de sa mère. L’idée d’en faire un métier lui paraissant farfelue, il choisit d’abord une carrière de psychoéducateur afin de travailler auprès des jeunes en difficulté.
Après quelques années, il revient à sa première passion, grâce au cinéma, et réalise quelques documentaires, films didactiques et courts métrages. En 1978, son documentaire Les vrais perdants le fait connaître du grand public. Il participe par la suite à la série des Contes pour tous du producteur Rock Demers en réalisant coup sur coup La Guerre des tuques et Bach et Bottine, deux films dont le succès ici et ailleurs dans le monde en a fait des classiques de la cinématographie québécoise. Sa douceur, son écoute et sa curiosité lui font gagner le cœur des enfants qu’il dirige sur les plateaux de cinéma.
En parallèle à son métier de réalisateur, André Melançon joue dans une vingtaine de films et téléséries, est entraîneur à la Ligue nationale d’improvisation (LNI) et met en scène des pièces de théâtre.
Photographies

André Melançon, enfant (photo scolaire)

La fratrie; André Melançon est le 2e à partir de la gauche.

À l’adolescence

André Melançon, jeune adulte

André Melançon, jeune adulte

André Melançon, jeune adulte

En train de faire la lessive à la main

Pendant le tournage de La guerre des tuques

André Melançon, coach de la LNI

André Melançon, acteur dans Joyeux calvaire, 1996

André Melançon joue aux échecs dans Printemps fragiles, 2010.

André Melançon durant le tournage

André Melançon reçoit le prix Albert-Tessier, 2012

André Melançon reçoit un prix hommage, 2015

Entrevue Magazine
André Melançon, vous êtes né à Rouyn-Noranda. Quel souvenir conservez-vous de votre enfance?
C’était une ville minière, tout était en fonction de la mine de cuivre et d’or. Une ville tranquille, calme, j’ai fait tout mon primaire là et j’en garde de très beaux souvenirs. Je composais avec mon environnement. Par exemple, vers 8-9 ans, mon père avait acheté une maison assez grande pour avoir des chambreurs, et il y avait un garage double avec deux grandes portes de chaque côté. Le garage était libre, alors j’en ai fait un lieu de spectacles. J’ai commencé par faire des petits cirques, puis j’ai joué des séances avec ma sœur, puis des amis. On racontait des histoires à travers des séances. Tu ne t’en rends pas compte, mais à un moment donné il y a un déclencheur qui t’influence, c’est le regard que portent les gens sur ce que tu fais. Ma mère était fascinée par ce que j’écrivais. Le regard d’admiration de ma mère, des oncles et des tantes qui venaient, c’était une vitamine extraordinaire pour poursuivre.
Vous partez de Rouyn en 1958 pour vous installer à Montréal. Comment avez-vous vécu cette transition?
C’était un choc culturel incroyable. À Rouyn, je connaissais le cinéma, parce qu’il était très présent, on voyait les films italiens, les films français, mais je n’avais presque pas vu de théâtre, je ne connaissais pratiquement pas la musique classique. J’arrive à Montréal vers 16-17 ans, et c’est une effervescence, le début du Théâtre du Nouveau Monde... Ensuite, je découvre la musique classique, je découvre Bach, la musique baroque. Ah! C’était très, très puissant, très fort, cette période de découvertes.
Avant votre carrière au cinéma, vous avez étudié à l’Université de Montréal en psychoéducation et vous avez travaillé quelques années avec des jeunes délinquants. Que retenez-vous de cette époque?
À Boscoville, où j’ai travaillé pendant cinq ans, on appelait ça une école de réforme dans ce temps-là, moi j’étais responsable des activités culturelles. On faisait du cinéma, du théâtre, un peu de littérature. J’étais déjà dans mon élément, c’est pour ça que je dis que ce n’était pas un détour, ce travail. On faisait notre gros possible pour amener ces jeunes-là sur un autre terrain, c’est-à-dire enlever certains oripeaux, changer la culture, valoriser ce qui était important. Je leur faisais écrire des mémoires, c’était fascinant, parce que c’était une prise sur la réalité. Tout ça m’a servi plus tard, c’est une façon d’aborder la réalité, de regarder, dont on se souvient toujours. Comment écouter, comment décoder, comment regarder : c’est en ligne directe avec mon métier de cinéaste. Que ce soit un jeune délinquant de 16 ans ou un enfant de 10 ans à qui tu demandes d’interpréter un personnage, tu dois avoir une attitude d’accueil, entendre comment ils réagissent, pour qu’ils se sentent assez en confiance pour faire un bout de chemin dans l’inconnu.
Impossible, en vous voyant, de ne pas aborder le sujet de votre taille, qui est imposante! Est-ce que votre grande taille vous a servie, dans votre carrière d’acteur?
Au début, oui, mais c’était un accident, vraiment par hasard. Au début des années 70, Clément Perron avait puisé dans ses souvenirs d’enfance pour écrire le film Taureau, dans lequel il y avait un grand gaillard, comme il avait connu dans son village. Ce personnage était une espèce de taupin, débile léger, dont les femmes étaient amoureuses et il était exploité par les hommes pour sa force, à faire des petits boulots pour presque rien. Un jour, Clément m’a croisé dans le corridor à l’Office national du film, où je tournais un film que je venais de scénariser, et il m’a proposé le rôle. Je lui ai dit que je n’avais pas fait d’école de comédien, mais finalement les producteurs de l’Office m’ont obligé à faire des screen tests et j’ai eu le rôle. Donc oui, mes débuts comme acteur étaient un peu reliés à ma stature.
Fondamentalement, vous êtes cinéaste. Quel plaisir cela vous apporte d’être comédien?
Je crois qu’on est plusieurs choses. D’abord, je suis un conteur, mais je peux conter en jouant un personnage. Pour moi, être acteur a été une très bonne école, parce que j’ai expérimenté la peur que peuvent ressentir les acteurs et actrices sur un plateau devant une caméra, quand ils entendent « action »; comment négocier avec cette peur, pour que ça ne devienne pas un frein, mais plutôt un stimulus. Quand plus tard j’ai travaillé avec des metteurs en scène, ça m’a beaucoup aidé pour diriger les comédiens, adultes et enfants.
À vos débuts comme cinéaste, vous avez réalisé le film documentaire Les vrais perdants. Est-ce l’œuvre qui vous a fait connaître d’un plus large public?
Oui, possiblement oui, à cause de l’actualité des propos. Ce documentaire a été produit dans les années 77-78, tout de suite après les Olympiques, et c’était une époque où tous les papas et les mamans qui avaient une petite fille rêvaient qu’elle devienne une Nadia Comaneci. Au début, j’observais les enfants s’entraîner de façon intensive, dans les sports ou les arts, pour comprendre comment ils vivaient ça. Je me suis rapidement rendu compte qu’il y avait quelque chose à dire sur ce sujet-là. En fait, j’avais surtout envie que les enfants s’expriment. Toutefois, je sentais que ce serait difficile, que pour un tas de raisons, l’enfant ne parlait pas vraiment, disait ce que les parents ou les entraîneurs avaient envie d’entendre. On a continué quand même, et au moment du montage, je me suis rendu compte que ce n’était pas un film, mais plutôt un cri du cœur d’enfants.
Votre film La Guerre des tuques est un énorme succès du cinéma québécois. Lorsque vous avez amorcé le projet, aviez-vous le sentiment qu’il prendrait ce chemin-là?
Particulièrement pour ce cas, je réponds « non » pour des raisons très précises. D’abord, le budget était très, très serré. Nous devions tourner à Montréal, nous n’avions pas le choix, mais nous nous sommes vite rendu compte que le printemps nous rattraperait et que nous finirions le film dans la gadoue. Nous avons dit à Rock Demers que ça n’avait pas de bon sens, mais lui il était pris à la gorge! Finalement, nous avons tourné ce que nous pouvions à Terrebonne. Nous avons fait trois jours dans la grange que nous avions louée, puis après nous avons eu le O.K. pour aller où il y avait de la neige, dans Charlevoix. Par contre, c’était pour moi mon premier long métrage de 35 mm. Celui que j’avais fait avant, Comme les six doigts de la main, était en 16 mm, donc c’était tout un langage différent, des cadrages différents et j’avais fait un découpage le plus précis possible, mais il a fallu tout changer. Donc, plusieurs obstacles ne laissaient pas croire à un tel succès.
Comment arriviez-vous à trouver tous ces jeunes acteurs à cette époque alors qu’il n’existait pas vraiment d’agences de distribution artistique?
On faisait le tour des écoles, on n’avait pas le choix! Danyèle Patenaude, une des scénaristes, et moi avions pris trois semaines complètes pour aller dans les classes d’enfants de 10 à 12 ans. Je regardais les enfants, je faisais un cadre de chacun pendant que Danyèle leur parlait. Ça durait une dizaine de minutes par classe. J’en retenais deux, trois ou quatre, on les amenait dans le corridor et on prenait leurs coordonnées. Le soir, on appelait les parents pour leur demander s’ils acceptaient que leur enfant passe une audition pour un long métrage. On a dû faire environ 250 auditions; on en a fait beaucoup, beaucoup.
Comment trouve-t-on des enfants qui ont un véritable talent d’acteur?
Ce n’est pas scientifique, c’est strictement instinctif, intuitif. J’y allais et je regardais, j’avais des personnages en tête. Quand j’ai commencé à travailler avec les enfants, j’avais l’impression que tous les enfants pouvaient jouer, incarner un rôle, et je me suis rendu compte que ce n’est pas tout à fait ça. Sur le plan du jeu dramatique, certains enfants ont l’instinct du jeu, pas tous. On ne peut pas faire beaucoup de prises avec un enfant qui n’a pas l’instinct, parce que ça devient mécanique. Alors qu’un enfant qui a l’instinct, c’est comme un acteur professionnel, ça se peaufine, ça se raffine avec la répétition. Ces enfants-là, il n’y en a pas des masses, mais quand on les trouve, ce sont des cadeaux.
Quelle différence faites-vous entre la réalisation d’un film de fiction, et celle d’un documentaire?
Documentaire ou fiction, faire un film, c’est toujours un plaisir en ce qui me concerne, mais le plaisir est un peu différent. Dans une fiction, c’est le plaisir de dire : « J’ai inventé, imaginé une situation de vie qu’on m’a proposée. » Parfois le scénario vient des autres, ou de moi, et j’essaie de recréer l’histoire. Il y a un plaisir extraordinaire de constater que ça prend forme, à un moment donné, et de travailler avec d’autres créateurs, comme le directeur photo ou les comédiens. Des gens qui ont leur part de créativité, à un moment donné, ça donne une ampleur et une couleur extraordinaires. Le plaisir du documentaire, c’est que la réalité se révèle tranquillement, un peu comme les anciens Polaroid qui se dévoilent quand tu les regardes. Parfois, c’est des découvertes exceptionnelles, on ne s’attendait pas à ça. Dans mon documentaire Les vrais perdants, quand Élisabeth dit : « Ce n’est pas vrai qu’on ne parle pas. C’est vous autres qui ne nous écoutez pas », c’est un moment exceptionnel, que je n’aurais pas pu créer.
Avez-vous des thèmes de prédilection dans vos réalisations cinématographiques?
Oui, je peux dire que j’ai des thèmes récurrents, j’ai souvent parlé des mêmes choses. Si j’avais à les identifier, c’est sûr qu’il y a l’importance de dire les choses, de nommer les choses. C’est le thème central de Bach et Bottine. Quand tu aimes quelqu’un, dis-lui! Quand tu es fâché contre quelqu’un, dis-lui! Donc, l’importance de communiquer. Oui, il y a des thèmes comme ça qui se retrouvent le long de mon parcours, comme de petites pierres blanches.
En parallèle à votre carrière de cinéaste, vous étiez aussi un entraîneur réputé de la Ligue nationale d’improvisation (LNI). Comment la LNI est-elle arrivée dans votre vie?
La comédienne avec qui je vivais à l’époque travaillait à la LNI et, un soir, Robert Gravel m’a suggéré d’embarquer pour démarrer une nouvelle équipe. J’ai accepté, à la condition de reconstruire l’équipe des Noirs, qui avait été bannie. J’ai regroupé Claude Laroche, Denis Bouchard, Marcel Leboeuf, Suzanne Champagne… « du gros stock »! Ça a été une très belle école pour moi, être coach, pour étudier le jeu de l’acteur. Voir des comédiens et comédiennes aguerris, talentueux, travailler, construire des personnages et des histoires, c’était fascinant!
Vous avez écrit la télésérie Cher Olivier au sujet d’Olivier Guimond, un grand succès télévisuel. Comment ce projet s’est-il présenté à vous?
Dans ma vie, beaucoup de choses ont commencé par un coup de téléphone. Dans ce cas-ci, c’est Richard Martin qui m’a appelé pour me faire venir chez Avanti, et qui m’a proposé d’écrire une série sur Olivier Guimond. Tout de suite, j’ai dit « oui ». Il y avait quelque chose chez ce bonhomme-là, Olivier Guimond, qui m’interpellait beaucoup, sans savoir quoi exactement. Ensuite, Richard m’a dit : « Les producteurs chez Avanti, par contre, ont déjà choisi le comédien pour Olivier. » Ça m’a rappelé mon histoire avec Les filles de Caleb, lorsqu’on m’avait imposé des acteurs et que j’ai dû quitter le projet à regret, et je me suis dit : « Ah, non, pas encore! » J’ai dit à Richard : « Non, écoute, ça fait 20 minutes que nous discutons du projet et tu me dis que l’acteur est déjà choisi? Non, non merci, bonne chance! » Au moment de partir, je lui ai dit : « De toute façon, la seule personne au Québec qui peut le jouer, c’est Benoît Brière. » Richard Martin me regarde en souriant et me dit : « C’est lui. » Alors je me suis rassis, et ça a été une très belle aventure. C’est un très, très beau souvenir, Cher Olivier.
Lors de votre discours pendant la soirée des Jutra alors que vous receviez le prix Hommage, vous avez mentionné l’importance de la culture et le fait qu’elle est fondamentale. Pourquoi l’est-elle selon vous?
J’ai l’impression qu’une société, qu’une collectivité qui perd sa culture, qui perd sa littérature, qui perd sa musique, ses chansons, c’est une société qui est condamnée à mourir de froid. C’est ça, mon « feeling ». L’uniformisation qu’il y a actuellement sur le plan culturel mondial, ça affecte la culture, mais ça ne l’a pas tuée, ça n’a pas tué les petites initiatives locales qui ont des répercussions, qui ont des suites. C’est important qu’il y ait encore cette envie de raconter, sans tenir compte nécessairement des impératifs financiers reliés aux standards du moment, qui ne cessent de changer. Quand je sens ces espèces de sursauts, ça donne de l’espoir, tellement d’espoir.
Qu’est-ce qu’il y a de plus beau dans votre métier?
Le fait qu’en 43 ans de carrière, il n’y a pas eu deux jours pareils. Ça, c’est un grand privilège. Aussi, c’est un métier qui t’amène à rencontrer des gens souvent exceptionnels. C’est parce que j’ai fait du cinéma qu’un jour on m’a présenté le docteur Gilles Julien, une rencontre importante pour moi. C’est aussi à cause du cinéma que j’ai rencontré ces trois dames de la Gaspésie qui ont chacune un centre d’hébergement pour femmes victimes de violence, des femmes exceptionnelles aussi. Le métier, c’est un immense carré de sable dans lequel tu peux jouer, essayer des choses, prendre des risques, te tromper, recommencer. Il y a des moments de douleur, mais les moments heureux pèsent davantage dans la balance.
0/0
Extraits Vidéo
-
Sur des images d’archives de Rouyn-Noranda des années 70, André Melançon explique, entre autres, que la vie est une suite de hasards. 0:18 min.
-
André Melançon explique les raisons de son changement de carrière, lui qui était intervenant dans un centre de rééducation pour jeunes délinquants. 1:14 min.
-
Lors de la première de Bach et Bottine, on demande à Mahée Paiement ses impressions à propos d’André Melançon. 0:20 min.
-
Bataille de boules de neige au moment de l’hommage rendu à André Melançon lors d’un gala en 2015; une scène pour le moins touchante. 0:26 min.
-
André Melançon s’entretient avec une journaliste au sujet du film Comme les six doigts de la main, sorti en 1978. 0:50 min